Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 13.djvu/627

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

par dragages, dans le golfe de Gascogne. Le Challenger en a dragué dans une foule d’endroits.

Je me suis livré à diverses expériences sur ces ponces. Je ne saurais les décrire ici sans risquer d’allonger beaucoup cette étude. Je me bornerai à dire que mes expériences m’ont amené à la conviction que les ponces de fond, quel que soit leur volume, ne proviennent que d’éruptions sous-marines actuelles. Celles qui ont été au contact de l’air froid et qui ont été amenées à la mer d’une manière quelconque : projection directe hors de la bouche du volcan comme en Sicile et surtout au Krakatoa en 1883, ou bien enlevées par les vagues à des amas de ponce formant rivage, ou bien encore arrachées par les pluies dans l’intérieur des terres et charriées jusqu’à la mer par les rivières et les torrens, toutes ces ponces, à moins qu’elles ne soient à l’état de poussière, ne descendent pas sur le fond. Elles flottent pour ainsi dire indéfiniment à la surface de l’eau, y deviennent le jouet des vents et s’isolent les unes des autres, quel qu’ait été leur amoncellement au début comme au Krakatoa où s’était formé contre le rivage un banc de ponces flottantes long de 30 kilomètres, large de 1 kilomètre et épais de 3 à 4 mètres. Eparpillés, chassés au loin par les courans, les fragmens finissent, quelle qu’ait été la durée de leur course errante, par arriver à très peu près intacts sur un rivage quelconque où ils s’échouent. À cause de leur extrême fragilité, ils sont alors immédiatement triturés par le ressac contre le sable de la plage. J’en ai vu flotter aux îles du Cap Vert autour de la Princesse-Alice, que j’ai recueillis, et j’en ai ramassé, après un orage, sur le sable à Sao Antao. Qui sait d’où viennent et combien de temps ont flotté les bouchons qu’il est si fréquent de trouver échoués le long du bord, dans des parages déserts où ils se conservent intacts pendant très longtemps, grâce à leur élasticité qui les fait résister aux chocs ? Au contraire, les fragmens de ponce, de nature huileuse et éminemment fragile, sont bientôt usés et réduits en poussière tellement fine et imperceptible qu’il n’est plus possible de les découvrir au milieu de l’énorme prédominance des galets, des graviers ou même simplement des grains de sable beaucoup plus gros et bien plus résistans des dépôts côtiers au sein desquels ils sont confondus.

Les ponces du fond, sorties de bouches volcaniques sous-marines avec leurs pores remplis de gaz chaud, sont « étonnées »