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et n’eurent d’autres armes que celles qu’ils ramassèrent sur les champs de bataille. Il n’était point possible que ces troupes résistassent aux épreuves auxquelles les soumettait l’ardeur intempérante de Gneisenau.

Ce fut pis encore à partir du 20, lorsque Napoléon apparut à Löwenberg pour arrêter les progrès de l’armée de Silésie et lui faire subir sa poussée vigoureuse.

Il était arrivé le 20 à Lauban ; le 21, il dirigeait sur Löwenberg le corps de Lauriston, celui de Macdonald et la cavalerie de Latour-Maubourg, et sur Bunzlau le corps de Ney, celui de Marmont et la cavalerie de Sébastiani. La présence de l’Empereur produisit son effet accoutumé. L’armée de Silésie dut battre en retraite et parcourir, en sens inverse, le terrain qu’elle avait gagné. Le 21, les troupes de York et celles de Langeron furent repoussées en avant de Löwenberg à Plagwitz. Le même jour, Sacken fut rejeté hors de Bunzlau. Blücher perdit dans cette journée 30 officiers et 1 600 hommes. Il avait appris l’arrivée de l’Empereur, et reconnu sa présence. Il résolut de lui refuser la rencontre décisive qu’il cherchait ; et, dans la nuit du 21 au 22, il groupa son armée en arrière de la Schnelle Deichsel, mais encore en avant de la Katzbach entre Adelsdorf et Pilgramsdorf. Le 22, Langeron, attaqué de nouveau par les Français, évacua, malgré les ordres de Blücher, la ligne de la Schnelle Deichsel, franchit la Katzbach à Goldberg et se retira en arrière de cette rivière jusqu’à Seichau. Mais Blücher, qui avait songé d’abord à défendre le passage de la Schnelle Deichsel, ne voulait du moins pas livrer sans combat la ligne de la Katzbach. Il accourut au quartier général de Langeron, et le reporta en avant sur la Katzbach, à Goldberg, dans la nuit du 22 au 23.

Ainsi, seule en somme des armées de la coalition, l’armée de Silésie exécutait à la lettre le fameux programme de Trachenberg ; poussant en avant son offensive contre les lieutenans de Napoléon, reculant dès que l’Empereur lui faisait sentir son effort personnel et sa présence ; se soustrayant à ses coups, mais toujours au contact des Français, et se dépensant en efforts incessans.

Cette tactique, prudente malgré son aspect d’exubérante ardeur, atteignit bien son but. Napoléon ne pouvait s’éloigner de Dresde, ni poursuivre l’adversaire qui se dérobait devant lui, et l’eût entraîné trop loin. Le 22, il disloquait les troupes qu’il