Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 13.djvu/784

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

était tombé à 6 277 hommes, au 1er septembre, était remonté quatorze jours plus tard à 8 540 hommes. Les bataillons qui s’étaient dissous dans la poursuite de la fin d’août se réorganisèrent. Le bataillon Brixen, celui qui, dans la nuit du 26, avait perdu 200 hommes sans s’être battu, se retrouva, le 4 septembre, à l’avant-garde près de Hochkirch ; et le 30, à Bunzlau, Horn réussit à forcer avec ses landwehrs épuisées, après trois attaques assez pénibles, le passage du pont sur le Bober. Ce qui demeure, c’est que le corps prussien n’avait eu qu’une part restreinte dans la victoire de la Katzbach, et n’en prit pour ainsi dire point à la poursuite qui désorganisa l’armée de Macdonald.

Lorsqu’on rapproche sa situation de celle du corps de Lauriston dans les journées qui suivirent la « rencontre sur le plateau, » il semble que poursuivans et poursuivis soient dans le même état de désorganisation. Les épreuves sont les mêmes, l’état des troupes est aussi pitoyable dans la poursuite que dans la retraite. D’où vient donc que le succès fut d’un côté et le désastre de l’autre ? Il serait sans doute injuste de négliger, comme le font volontiers les historiens prussiens, l’élément considérable de succès qu’apportaient à Blücher la résistance et la solidité des vieilles troupes russes. Il serait également injuste de méconnaître que la cause principale du désastre des Français a été dans la différence de l’état moral des deux armées, dans la vigueur indomptable, dans la confiance inébranlable de cet état-major silésien, où la Prusse a cherché, — non sans raison, — comme la synthèse de son esprit national.


Mais cette énergie n’allait pas sans une brutalité qui dépassait les bornes : ce n’était pas seulement cet esprit querelleur, ce défaut de formes, cette grossièreté de relations que raillait Langeron. C’était quelque chose de plus et quelque chose de pis. Les édits qui avaient organisé le landsturm au printemps de 1813, contenaient des prescriptions barbares. Les lettres par lesquelles Blücher et Gneisenau prescrivaient au gouverneur de la Silésie de sonner les cloches et de convoquer le landsturm au lendemain de la Katzbach, éveillaient comme un écho de cette inhumanité. Ce n’était point seulement pour ramasser les prisonniers français que Gneisenau faisait convoquer le landsturm et soulever la population : c’était aussi pour les massacrer.

L’on pourrait croire, à lire les lettres qu’il adressait à Munster