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libéralisme et de laisser aux catholiques français et à leur clergé la liberté dans le droit commun ? Toute la question est là ; et, aux yeux d’un politique ou d’un patriote, comment la réponse serait-elle douteuse ? L’anti-cléricalisme enjoint à la France de donner sa démission de grande nation catholique, sans comprendre qu’elle risque, du même coup, de donner sa démission de grande puissance. La France est-elle tenue de se soumettre à l’injonction anti-cléricale ?


IV

Rassurez-vous, nous dira-t-on. Il en sera de la loi de juillet 1901 et de cette nouvelle guerre aux congrégations religieuses, comme il en fut, il y a une vingtaine d’années, des décrets de Jules Ferry et de la dispersion des Jésuites. Il se peut ; et, pour notre part, nous avons trop de foi en la liberté pour admettre que la République puisse longtemps la tenir en suspicion, par peur du froc des moines ou de la cornette des sœurs. Mais quand le gouvernement devrait bientôt se relâcher de l’application de cette loi Waldeck-Rousseau, — ou mieux, car il ne serait même pas nécessaire d’abroger la loi, quand le gouvernement et le parlement se décideraient à l’entendre d’une manière libérale en accordant les autorisations qu’ils refusent aujourd’hui systématiquement, la guerre faite aux congrégations enseignantes ne dût-elle durer qu’une dizaine d’années, que l’espace d’une ou deux législatures, c’en serait assez déjà pour amener la ruine de nombre d’établissemens français et porter à notre influence et à notre langue, dans tout l’Orient, un dommage peut-être irréparable. Et qui nous garantit que la République n’aura besoin que de quelques années pour comprendre l’erreur de son attitude vis-à-vis des religieux français et revenir envers eux à une politique plus équitable et plus intelligente ? Les passions anti-cléricales et l’esprit de secte qui ont exigé le vote de la loi de 1901, qui, depuis, en ont encore aggravé l’intolérante rigueur, ne semblent pas près de confesser leur faute. Leur violence et leur aveuglement sont tels que, pour les éclairer ou pour les désarmer, la conscience des torts faits à l’influence française ne saurait suffire.

Autrefois, les hommes qui avaient, les premiers, engagé la