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vieille Sixtine ne se ferme pas devant l’apothéose qui couronne l’histoire évangélique. Après que le Christ est remonté au ciel, sa pensée, qui parlait dans les prophètes et vivait dans les patriarches, continue d’animer l’Eglise et d’éclairer ses chefs. Des allusions à la papauté sont lisibles déjà dans les fresques consacrées à Moïse et à Jésus. Le prêtre qui reçoit le sacrifice du lépreux guéri et le grand prêtre Aaron debout en face des lévites rebelles portent la tiare à triple couronne. Dans le récit de l’Évangile, une importance exceptionnelle est attribuée à la vocation des apôtres, dont le pape est l’héritier, et à la remise des clefs, dont il est le dépositaire. La gloire de la papauté, entrevue dans la Bible, annoncée dans l’Evangile, est proclamée, au-dessus des scènes animés et confuses qui se suivent sur les parois, par une assemblée de figures solennelles rangées entre les fenêtres, et debout dans des niches, comme autant de statues. Ces personnages, en qui semblent se continuer les deux Testamens, ce sont les papes martyrs, les papes aux noms grecs, Eleuthère, Eutychius, Télesphore, tous parés de la chape, des gants et de la tiare pour le sacerdoce éternel.

Le sens « pontifical, » qui, dans les fresques de la Sixtine, s’ajoute au sens biblique et évangélique, a sans doute été donné à cette décoration par la volonté du pontife qui l’a commandée. Sixte IV a pu faire traduire par les peintres ses idées de pape théologien, comme il leur a fait exprimer les sentimens de sa dévotion personnelle. Le fondateur de la Sixtine avait voué un culte ardent à la Vierge : il fonda en son honneur les églises de Santa Maria del Popolo, de Santa Maria della Pace, et une magnifique chapelle dans la basilique de Saint-Pierre, qu’il destina à recevoir sa propre sépulture. Sixte IV dédia de même la chapelle du palais apostolique à la Vierge glorieuse, et la consacra solennellement le jour de l’Assomption. Le chroniqueur Sigismondo dei Conti nous montre le pape Sixte abîmé en de longues prières aux pieds d’une image de la Vierge. Sur la fresque qui surmontait l’autel de la Sixtine, comme un retable démesuré. Sixte IV se fit peindre dans l’attitude où le voyaient ses familiers : à genoux devant le groupe des apôtres qui regardent la Vierge montant au ciel parmi le chœur des anges. La fresque a disparu avec les deux compositions qui la surmontaient, Jésus dans sa crèche et Moïse dans son berceau, sous l’avalanche humaine du Jugement dernier ; mais cette Assomption, où figurait