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ou d’enfans nus, soutenant la targe aux armoiries de Sixte IV. Partout au milieu des lauriers et des acanthes classiques intervient le chêne des Della Rovere, représenté tantôt par un arbrisseau héraldique, tantôt par une branche courante, toute garnie de feuilles et de glands. Les motifs mêmes qui ont eu pour modèle l’aiguière sculptée sur un autel romain, le faisceau d’armes d’un arc de triomphe, la Gorgone d’un camée, coiffée de serpens et d’ailes, sont traduits par le sculpteur dans le plus pur toscan. Les candélabres qui surmontent les pilastres ont la richesse légère et joyeuse des meubles de marbre qui sont la parure des églises florentines. Le maître sous les ordres duquel fut ciselée la cancellata de la Sixtine a dessiné encore la tiare et le chêne, au milieu d’ornemens sveltes et magnifiques, sur la tribune aux chanteurs et sur la porte d’entrée. Ce maître n’est point cité dans les registres pontificaux ; mais les fines guirlandes de la cancellata et les putti aux mines étonnées gardent dans leurs lignes et dans leur sourire la signature d’un artiste personnel et charmant. Le sculpteur que Sixte IV employa dans sa chapelle est un Toscan qui travaillait depuis vingt ans pour les papes et les cardinaux et dont la fantaisie gracieuse et mièvre, disciplinée par un impeccable instinct de décorateur, s’est jouée dans la plupart des églises de Rome : c’est l’improvisateur délicieux, celui qui fut dans la famille des marbriers florentins l’enfant gâté, Mino da Fiesole.

A côté du sculpteur fécond, un seul peintre de renom, Melozzo de Forli, se trouvait occupé à Rome lorsqu’en 1480 les murs de la Chapelle Sixtine furent prêts à recevoir des fresques. On ne sait pourquoi Sixte IV n’employa pas à la décoration de sa chapelle l’artiste qui venait de peindre son portrait dans la bibliothèque du Vatican. Le pape manda tout exprès des peintres de Toscane et d’Ombrie. C’est probablement l’architecte florentin de la Sixtine qui servit d’intermédiaire. En sa qualité de commissaire des constructions du palais apostolique, Johannes de Dulcibus, habitator Romæ, passa contrat, le 27 octobre 1481, avec quatre peintres : Cosmo Laurentii Philippi Rosselli, Alexandro Mariani et Domenico Thomasii Corradi de Florentia et Petro Christofori Castri Plebis Perusini. Ces noms latins sont ceux des Florentins Cosimo Rosselli, Alessandro di Mariano, dit Botticelli, Domenico di Tommaso, dit Ghirlandajo, et de Pietro de Castel della Pieve, dit le Pérugin. Deux aides que le notaire pontifical a