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déguisées, de satisfaire ceux-là, d’évincer celles-ci. M. de Hartel, qui fait autorité dans la science philologique pour le tact exercé avec lequel il publie les écrits des Pères Latins et tranche entre les diverses variantes un différend toujours épineux, est appelé, aujourd’hui, à surveiller les interpolations politiques qui volontiers envahissent la Réforme, et à déchiffrer les consciences, si quelque autre que Dieu pouvait les déchiffrer. Aussi indulgent comme ministre que sévère comme critique, il a déjà donné son agrément, pour des postes en Autriche, à plus de cinquante pasteurs venus d’Allemagne. Mais ceux dont justice a été faite ne pardonnent point, et l’un des expulsés, M. Everling, disait naguère à Zittau : « Nous pouvons aider nos frères allemands d’Autriche — dernier rayon d’espérance — avec de l’argent. L’argent est un article qui, même en Bohême, n’est pas encore expulsé. » On aurait dit, à entendre M. Everling, qu’un assaut se préparait entre une bureaucratie « jésuitisée » et des capitaux étrangers, et que les âmes en seraient l’enjeu ; M. de Hartel, qui sait à quel prix les Pères mettent la plus humble des âmes, doit assurément s’étonner de cette façon nouvelle de les estimer.

M. Everling était, du moins, sincère : le nerf de la guerre devenait en effet le nerf de l’Evangile, ainsi que le montrait récemment M. Kramar, le député jeune-tchèque, dans un discours aux Délégations. La Ligne évangélique, en 1899, dépensa pour l’Autriche 90 964 marks, dont 19 400 pour frais d’agitation, 13 500 pour propagande de brochures, 35 000 pour entretien des pasteurs et des vicaires ; en 1900, elle dépensa 99 299 marks ; en octobre 1901, elle évaluait à plus de 400 000 marks le total de ses débours. L’Association Gustave-Adolphe, qui d’après ses statuts ne doit point aider à la fondation d’Églises nouvelles, mais soutenir les communautés déjà existantes, s’est penchée sans retard, avec une main largement ouverte, vers quelques-unes des paroisses qu’a fait surgir le mouvement Los von Rom : de 1897 à 1901, les subventions qu’elle donnait en Bohême se sont élevées de 138 000 à 264 000 marks, et celles dont elle gratifiait la Styrie de 12 000 à 51 300 marks. Certains gouvernemens de l’Empire allemand ont laissé faire des collectes pour la diffusion de l’Evangile allemand ; une association nouvelle s’est fondée à Barmen pour y aider ; et l’attitude des vieux luthériens de Brunswick, s’étonnant que l’Allemagne, qui aurait elle-même