Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 14.djvu/312

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et si les divisions paroissiales sont appropriées aux besoins des temps. Voilà la double réforme dont beaucoup de bons esprits, dans l’Eglise d’Autriche, commencent à se préoccuper. Il suffit de pénétrer dans l’intérieur de quelques prêtres autrichiens pour constater qu’ils succombent sous le poids des corvées bureaucratiques : il entre dans leur fonction de prêtres, depuis Joseph II, de faire les écritures qui chez nous sont confiées au secrétaire de mairie ou à un scribe de gendarmerie ; et le travail que leur donne ainsi l’Etat entrave étrangement leur ministère. La prédication en souffre, le catéchisme en souffre ; et l’Eglise devient une grande teneuse de livres, qui catalogue les têtes des sujets ou des conscrits, mais qui n’a plus le loisir d’une prise sur leurs âmes. Les âmes, d’ailleurs, sont souvent très loin : sur le terreau de la grande industrie de grosses agglomérations ont germé, sans qu’aucun clocher rompît le fil monotone de leurs cheminées d’usines. Turn avec ses 10 000 catholiques était une cité sans église quand les pasteurs d’Allemagne, il y a trois ans, lancèrent l’appel pour y construire un temple ; la secousse fit rapidement s’ouvrir le sol pour la première pierre d’une église catholique ; et les 10 000 fidèles de Turn, qui jusqu’ici n’avaient d’autre paroisse qu’une église située à une demi-heure de route, desservant plusieurs villages et pouvant contenir au plus 500 personnes, seront à l’avenir moins oubliés. Une lacune pareille, à Krammel-Obersedlitz en face d’Aussig, est pareillement réparée. Mal servi et souvent desservi par les instituteurs, le clergé ne peut compter que sur ses propres forces ; et des divisions paroissiales datant du lendemain de la guerre de Trente ans lui sont un cadre d’action plutôt médiocre.

Lors même que la bureaucratie d’Etat, secondant la bonne volonté des évêques, serait moins lente à donner les autorisations nécessaires pour la multiplication des paroisses, une question subsistera, singulièrement épineuse : celle des évêchés. Ils sont en même nombre, en Bohême, qu’il y a un siècle, au temps où la population du royaume était trois fois moindre. Deux évêchés nouveaux sont depuis longtemps projetés : l’un dans une ville tchèque, comme Pilsen ou Kutenberg ; l’autre dans l’une des villes que les Allemands considèrent comme leurs, Eger par exemple ; mais on devine que déjà l’opinion tchèque s’émeut, tant parmi le clergé que parmi les laïques, à la pensée que Rome, par la création en terre bohémienne d’un évêché allemand, porterait une atteinte