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que vous remarquez d’elle sur mon chapitre. Je souhaiterais qu’elle ne prenne pas les choses si à cœur, de crainte que sa santé n’en souffre, et cependant je suis transporté de sa sensibilité qui me fait connaître le fond de son cœur. » En même temps, il remerciait Madame de Main tenon des conseils que, plus clairvoyante ou plus ferme que Beauvilliers, elle n’hésitait pas à lui faire parvenir, et se défend avec douceur contre certains reproches qui ne lui semblent point mérités. « La franchise avec laquelle vous me parlez, ainsi que je vous en ai toujours supplié, m’a fait un très grand plaisir. Je répondrai à ce que vous me dites avec la vérité dont vous savez que je fais profession. Il est vrai qu’ayant acheté depuis un mois une lunette d’approche anglaise, j’en ai trois ou quatre fois regardé la lune ou quelque autre planète, et que j’ai ici un petit anneau astronomique avec lequel je règle ma montre sur le soleil, quand on le peut voir. Mais cette opération ne prend pas beaucoup de temps, et, pour l’ordinaire elle ne doit pas dépasser la minute… Sur ce que vous me dites des conversations avec les bons officiers, j’en chercherai des occasions pour m’instruire et savoir leurs pensées dans un temps où l’on a plus besoin que jamais de ne point faire de fautes. Il est certainement épineux. Mais j’espère en la miséricorde de Dieu qui, comme vous l’avez souvent remarqué, Madame, n’a jamais laissé aller les affaires de personne à une certaine extrémité, sans les relever ensuite par quelque consolation[1]. »

Les lettres de la Duchesse de Bourgogne ont été perdues également. Elle lui écrivait souvent, ce qui était un grand changement dans ses habitudes. Le marquis de Ruffey, qui avait été envoyé au camp de Marlborough pour traiter d’un échange de prisonniers, étant en même temps porteur d’une lettre de la Duchesse de Bourgogne pour son mari, nous savons, par les Archives de la Guerre, que Marlborough s’empressait de la lui faire parvenir avec une lettre respectueuse, et que le Duc de Bourgogne lui fit « une réponse honneste » où il croyait « n’avoir rien mis contre le service du Roi. » Ainsi, une certaine courtoisie, entre ceux qui tenaient dans les armées un rang élevé faisait contraste avec la dureté que, de part et d’autre, on apportait dans l’application des lois de la guerre.

Durant ces jours maladroitement perdus, une bonne nouvelle

  1. Le Duc de Bourgogne, etc., p. 243 et 260.