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arrivait cependant au camp de Lovendeghem. Peu heureuses en France et en Savoie, les armées du Roi avaient triomphé en Espagne. Le duc d’Orléans avait repris sur les adversaires de Philippe V la forte place de Tortose. L’annonce de ce succès était apportée par un courrier, et le Duc de Bourgogne se faisait un devoir d’en rendre publiquement grâces à Dieu, en même temps qu’il implorerait son secours. Il décida donc qu’un Te Deum auquel il assisterait serait solennellement chanté dans la cathédrale de Gand. Sans doute aussi l’occasion lui parut bonne pour reconnaître l’attachement que les Gantois témoignaient à leur souverain légitime Philippe V, et le respect dont ils environnaient sa propre personne. Quelques jours auparavant, Contades, major général, rendait compte que quantité de bourgeois et de peuple de Gand étaient venus voir l’armée et le dîner du Duc de Bourgogne. Le prince avait bu à la santé du peuple de Gand, et le peuple avait fort crié : « Vive les Bois de France et d’Espagne ! » Il avait fait donner son fruit aux femmes et beaucoup de vin au peuple. « Ils s’en sont tous en allés charmés, ajoutait Contades, en criant qu’ils donneroient volontiers tout ce qu’ils ont au monde pour le service du Roi[1]. » À ces démonstrations populaires, le Duc de Bourgogne répondait par une visite officielle, et voici en quels termes le même Contades rendait compte de la cérémonie : « Monsieur le Duc de Bourgogne fut hier à Gand. Il fut reçu à la porte par les magistrats dont les six principaux portoient la poésie. Deux cents des principaux habitans marchoient devant lui, en tenant des flambeaux de cire blanche et allumée. Toute la bourgeoisie estoit sous les armes qui estoit en haye depuis la porte de Bruges par laquelle il entra jusqu’à la grande église où l’évêque l’attendoit à la porte et le receut, puis chanta une grand’messe et le Te Deum ; on suite de quoy Mgr le Duc de Bourgogne fut dîner à l’Hostel de ville[2]. » Quelques jours après, le Mercure de France complétait ce récit en racontant le dîner : « Le repas fut très magnifique. On servit de très beaux poissons et le fruit fut trouvé admirable. La symphonie se fit entendre pendant tout le repas et fut trouvée fort bonne[3]. »

Le lendemain même du jour où prenaient place à Gand ces

  1. Dépôt de la Guerre, 2 081. Contades à Chamillart, 26 juillet 1708.
  2. Ibid., 2 082. Contades à Chamillart, 11 août 1708.
  3. Mercure de France, numéro d’août 1708, p. 299.