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De l’usine parlent, à la tension de 5 000 volts, trois courans alternatifs, — « triphasés, » en langue technique, — dont les marches différentes se combinent, et annulent ainsi leur mutuelle alternance : l’une étant au point fort tandis que l’autre est au point faible. Ces trois courans sont d’abord réduits, sur trois bobines, au dixième de leur puissance, dilués, comme de l’alcool pur dont on augmente le volume en abaissant le degré. Ils sont mélangés ensuite et transformés en un seul courant continu. Ces deux opérations leur font perdre 20 pour 100 de la force initiale, dont « m n’utilise ainsi que 80 pour 100.

Au début de l’exploitation, l’énergie électrique était distribuée aux voitures automotrices uniquement par le rail, dit « de prise de courant, » établi à droite de la voie. Ce rail, chargé par l’augmentation du trafic d’une intensité exagérée, donna lieu à des pertes importantes. Pour y remédier, des « feeders, » ou câbles de gros diamètres, transmettent aujourd’hui directement, de l’usine, une force constante. Le retour du courant épuisé, — à 4 ou 5 volts de tension seulement, — se fait par un des rails de roulement.

Asseyons-nous à côté du mécanicien, — du « wattman, » — dans l’étroite cabine où il se tient, à l’avant de la voiture automotrice, mais ne l’importunons pas de questions ; il n’aurait guère le loisir d’y répondre. Son métier exige une application soutenue. Tourner de la main droite la manivelle de l’appareil appelé « contrôleur, » qui établit le contact par des balais frotteurs, règle, modère ou coupe le circuit, et manœuvrer de la main gauche, ou du pied, le frein à air qui agit sur toutes les voitures, semble chose peu compliquée. Mais il est de bonnes et de mauvaises manières de conduire un train. Le démarrage, graduel ou précipité », la marche « par séries » ou en « parallèle, » importent fort à la Compagnie. Le wattman gâche ou économise beaucoup d’électricité, suivant qu’il est plus ou moins habile. S’il a bon doigté, il sait prendre toute sa vitesse entre deux stations, lancer son train et le laisser ensuite filer par la force acquise.

Il a l’œil fixé sur les signaux du « block-system » qui jalonnent sa route : chaque train fait passer au rouge la lueur jaune du fanal qu’il franchit ; il remet en même temps au jaune la lumière de l’avant-dernier fanal rouge, à quelque cinq cents mètres derrière lui, libérant la voie à mesure qu’il avance. Il est ainsi