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de l’élément français est rapide, ce qui prouve que notre race n’est pas épuisée, chaque fois qu’on la transplante dans un pays où elle rencontre une existence moins facile et plus active que celle de la mère patrie : l’exemple du développement de la race française au Canada vient encore confirmer cette opinion. Il faut remarquer cependant que la loi de 1889, qui répute Français tout individu né sur notre sol, a eu pour effet de comprendre parmi nos nationaux des enfans d’étrangers qui n’ont peut-être rien de commun avec nos sentimens et notre civilisation ; mais l’inconvénient est minime, car ils finissent à la longue par s’assimiler ; le charme du pays est si puissant que quiconque s’y est une fois fixé ne le quitte plus.

La colonisation espagnole, en particulier, donne de bons et robustes travailleurs ; les femmes de ce pays épousent volontiers des Français, et il se produit ainsi, non pas une fusion complète, mais un rapprochement très sensible entre les deux races. Certains étrangers eux-mêmes, sans se faire naturaliser[1], ont souvent des sentimens sympathiques pour notre pays, et, dans les momens difficiles, ils ont en diverses circonstances demandé des armes pour nous aider an maintien de la sécurité. Il ne faut cependant pas se lier outre mesure à la fidélité de ces colonies étrangères, qui, en cas de guerre extérieure, pourraient, sur divers points, constituer un véritable danger.

Les deux peuples qui fournissent le plus grand nombre d’émigrans sont les Espagnols, concentrés pour la plupart dans la province d’Oran, et les Italiens, qui habitent particulièrement les deux autres. Après eux viennent les Marocains et Tunisiens, en grande partie israélites.

Peu nombreux, et disséminés sur tout le territoire, les israélites qui, bien que la loi leur ait conféré la nationalité française, sont encore recensés à part, forment un groupe de grande importance par l’étroite solidarité qui les unit, par leur habileté financière, et par les ressources dont ils disposent. On les rencontre partout ; détenteurs de capitaux, dans un pays où presque toute la population est besogneuse, ils les emploient en grande partie en prêts à gros intérêt ou en acquisitions de terres indigènes dont ils gardent les habitans comme fermiers après les avoir expropriés. Grâce à cette situation, ils ont réussi à réunir

  1. Le nombre des naturalisations est assez faible, bien qu’elles soient favorisées par des dispositions spéciales à l’Algérie.