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permet le mot, une bien plus grosse affaire que celle des congrégations. Ah ! nous marchons vite, avec M. Combes, et il ne nous laisse guère le temps de respirer !

Le discours dont nous parlons ne doit rien à la chaleur communicative de l’improvisation : . c’est un acte réfléchi, mûri, préparé, et qui avait été d’ailleurs annoncé assez longtemps à l’avance. On savait qu’il existait certaines difficultés entre Rome et le ministère au sujet de la nomination des évêques, et des notes officieuses publiées par les journaux avaient fait pressentir que M. le président du Conseil s’en expliquerait au Sénat à propos du budget des Cultes. C’est ce qui est arrivé. M. Combes a pris la parole, et, dans un discours dont tous les termes étaient évidemment pesés, qu’il a prononcé d’une voix lente et sûre, sans aucune passion apparente, mais avec un air de résolution calme et froide, il a dressé contre l’Église catholique en France et contre son gouvernement à Rome le réquisitoire le plus agressif. Le Sénat s’est associé à la manifestation de M. le président du Conseil. Non seulement il a donné à celui-ci un vote d’approbation et de confiance, mais, à une très forte majorité, il a ordonné l’affichage de sa harangue : on peut la lire en ce moment sur les murs des 36 000 communes de France.

Deux choses doivent y être distinguées : d’abord un exposé du conflit pendant entre la Curie romaine et le gouvernement actuel de la République ; ensuite une longue énonciation et énumération des griefs que ce gouvernement a contre le clergé séculier aussi bien que régulier. Le conflit porte, lui aussi, sur deux objets divers : le texte de la formule que la Curie romaine emploie dans la bulle d’institution canonique des évêques ; et ensuite l’entente officieuse et préalable qui se fait depuis un nombre d’années assez considérable, — et qui, croyons-nous, s’est faite de tout temps, sous des formes parfois plus enveloppées, — entre les deux parties qui concourent nécessairement à la nomination et à la consécration des membres de l’épiscopat.

La formule employée dans les bulles dit que le Pape donne l’institution canonique aux évêques que le gouvernement de la République lui a nommés, nobis nominavit. Ce n’est pas la première fois qu’elle a provoqué de notre part quelques susceptibilités. D’après le Concordat, le Premier Consul nomme aux évêchés qui deviennent vacans, et l’institution canonique est donnée par le Saint-Siège « suivant les formes établies par rapport à la France avant le changement de gouvernement. » Il y a donc là une question de fond et une question de