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Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 14.djvu/90

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du rôle de la France sur les terres lointaines[1]. Il y a peu de régions du globe où nos religieux n’aient pénétré, et l’on sent quel dommage irréparable porterait à, « la France du dehors » la disparition de ces établissemens français.

Les hommes qui réclament, impérieusement, la suppression des congrégations ne se doutent même point, le plus souvent, de l’importance de nos établissemens religieux à l’étranger. Sait-on à quel chiffre s’élève le nombre des écoles, collèges, orphelinats de nos congréganistes français au dehors ? A une dizaine de mille environ, et aux écoles, il faut ajouter plusieurs centaines d’hôpitaux, léproseries et dispensaires, répartis, eux aussi, dans les cinq parties du monde. Dix mille établissemens fondés et entretenus par l’initiative privée, et qui, pour la plupart, sont des foyers de l’influence française, voilà ce qui se trouve aujourd’hui menacé par les haines aveugles de l’anti-cléricalisme. Et si l’on vient à les fermer, ces dix mille établissemens français, ou, ce qui revient au même, si on leur enlève les ressources dont ils vivent, par quoi seront-ils remplacés ? En quelles mains, hostiles ou étrangères, viendront-ils à tomber ?

Ces dix mille établissemens se partagent, il est vrai, entre les congrégations autorisées et les non autorisées ; mais les dernières en possèdent plus de la moitié, et c’est à elles qu’appartiennent les établissemens les plus importans, comme l’Université de Beyrouth. La part des congrégations autorisées est d’environ 4 200 écoles ou collèges et 240 établissemens hospitaliers ou dispensaires. Mais ces milliers d’écoles, ces centaines d’hôpitaux ou de dispensaires, sont-ils seulement assurés de n’être pas bientôt atteints, eux aussi, par les proscriptions anti-catholiques ? N’entendons-nous pas, déjà, la logique radicale et les convoitises socialistes réclamer, à grands cris, l’anéantissement total de toutes les congrégations ? Et, il faut bien le reconnaître, si l’Etat croit de son droit et de son devoir de supprimer les unes, on ne voit guère pourquoi il épargne les autres. Une fois que vous les avez déchaînées, il vous est malaisé de faire leur part aux passions sectaires. L’événement nous montre déjà combien se trompaient les

  1. Voyez la France au dehors : les Missions catholiques françaises au XIXe siècle, 5 vol. in-4o ; librairie Armand Colin. Ier volume : Missions d’Orient ; IIe Abyssinie, Inde, Indo-Chine ; IIIe Chine et Japon ; IVe Océanie et Madagascar ; Ve Afrique. — Le VIe volume, qui n’a pas encore paru, doit être consacré aux missions d’Amérique.