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pavillon sur le Fort, bâtiment de moindre tonnage, et remaniera les états-majors, de façon à conserver avec soi les officiers dont le mérite lui est plus particulièrement connu.

Pour le suivre, il désigne d’abord Nesmond, compagnon des jeunes années, témoin des plus lointains souvenirs, et avec lui Rosmadec, Château-Morand, Venize, que tous quatre la fièvre à son tour aura bientôt marqués. pour la mort. C’est ensuite Beaujeu, puis d’Aligre, puis d’Hautefort, puis bien d’autres, prêts à toutes les audaces comme à tous les sacrifices, et, parmi eux, le plus aimé, Dreux de Rousselet, marquis de Château-Renault, chez qui s’allie à ce particulier dévouement du subordonné fidèle la constante affection du neveu.

Nul d’ailleurs, honnis ceux que la maladie a déjà terrassés, ne souhaite faire partie de la division de retour. Elle est confiée à La Harteloire, le plus jeune des officiers généraux, qui doit à sa récente ancienneté de grade, plus encore qu’à ses réelles qualités militaires, un commandement peu envié.

Toutes choses étant ainsi réglées, Château-Renault ne songe plus qu’à se mettre en route. Mais pour secouer la torpeur des Espagnols ; pour ne pas être, comme Coëtlogon, victime de leurs lenteurs, ce n’est pas en simple auxiliaire, mais bien en supérieur qu’il se présentera au général de la flotte du Mexique.

« Je crois, écrit-il à don Manuel de Velasco, que Votre Excellence aura appris que je suis en ces mers il y a près de deux mois, avec trente vaisseaux de ligne du Roi Très Chrétien, mon maître ; que j’ai l’honneur d’être capitaine général de Sa Majesté Catholique, et que je porte le pavillon d’Espagne. » Puis, comme en un blâme, il poursuit : « J’apprends avec une extrême surprise, Monsieur, que la flotte du Mexique est encore à la Vera-Cruz… C’est un contre-temps très fâcheux pour l’Espagne dans la situation où sont les affaires de l’Europe… et comme je crois que rien n’est plus important que de conduire cette flotte en Espagne, je vais employer tout ce qui dépend de moi pour y satisfaire… » Il fixe même la date approximative du départ : « Ainsi, Monsieur, il me paraît qu’il est d’une grande conséquence que la flotte se prépare à mettre à la voile dans la fin de mars ou dans les premiers jours d’avril, qui sont les temps les plus propres à sortir de ce lieu, selon qu’on m’a dit. » Et, pour bien indiquer qu’il entend faire porter à don Manuel la responsabilité de tout nouveau retard : « Je dois vous dire, à