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ART ET MÉTIER

LA SCULPTURE


I

A l’origine, la sculpture est inséparable de l’architecture, dont elle n’est que la parure accidentelle, — comme le vêtement de grâce, — mettant des fleurs discrètes à l’angle des chapiteaux, traçant lentement de symétriques et timides ornemens le long des frises, bien avant d’oser interpréter la figure humaine. Qui tentera, à quelle heure du monde, la première image de l’homme ? Lentement, d’un heureux hasard du « métier au tour, » ou de la vague ressemblance des formes, le vase grossier s’arrondira, à l’imitation de l’être, sous les doigts surpris de l’ouvrier. Et l’amour encore, achevant le miracle nouveau, déterminera cette conquête pure de l’esprit, inventant la plastique à l’aurore des civilisations, comme il apportera la pitié au monde vieillissant. Que si l’on se souvient de la jeune Corinthienne, Coré, fille du potier Boutades, qui, traçant, un soir, sur la muraille, la silhouette de son amant, à la lueur vacillante de la lampe familiale, vit son père en remplir d’argile le contour, on ne trouvera dans la légende antique que le symbole charmant de l’invention, — alors nouvelle à Corinthe, et pour toute la Grèce, sans doute, — de l’art du modelage. Et ce fut, en effet, un progrès immense, quelque chose comme l’éclosion d’une idée, à l’heure