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avaient observé déjà que le temple des réformés, indûment démoli en 1648 par les écoliers des Jacobins ameutés, et rebâti par arrêt du Conseil du Roi, avait été de nouveau démoli, et l’arrêt du Conseil inexécuté, jusqu’en 1654, où les protestans, de guerre lasse, durent aller l’établir ailleurs. Or, le registre de Voyer d’Argenson, confirmé par les procès-verbaux de la Compagnie de Limoges[1], nous montre l’ingérence en cette affaire de la Compagnie du Saint-Sacrement, qui soutint les démolisseurs et réussit à empêcher la juste réparation accordée par le gouvernement. — Les historiens de Metz[2] avaient déjà raconté que le maréchal de Schomberg, gouverneur, sollicité en 1644 par le clergé messin de prendre contre les huguenots plusieurs mesures rigoureuses, les avait toutes immédiatement accordées, et cela, dans une ville où, pourtant, l’accord moral semblait prendre racine entre les citoyens des deux religions. Or, nous apprenons que la Compagnie du Saint-Sacrement de Metz « s’était plainte », cette année même[3], « de la protection trop grande que recevaient, « selon elle, » les hérétiques de la part des personnes d’autorité, » et que, si le secrétaire d’Etat, comte de Brienne, écrivit alors, à ce sujet, au maréchal, cette lettre avait été sollicitée par la Compagnie du Saint-Sacrement de Paris. — Et ce ne sont pas là les seuls exemples[4] de démarches de cette Compagnie précédant, et expliquant, des vexations locales ou des rigueurs générales.

Quant à la pression, affirmée par d’Argenson, de la Compagnie sur les Assemblées quinquennales du clergé de France, il faudrait, certes, pour l’affirmer sans hésitation, que nous pussions collationner les mémoires, fournis par la Compagnie au clergé réuni, avec les rapports des commissaires, les procès-verbaux des commissions ou les décisions finales de l’Assemblée. Les documens existans ne nous le permettent pas[5] ; mais, à défaut, ils nous permettent au moins d’observer que, dans les Assemblées du clergé depuis 1636, les ecclésiastiques les plus actifs contre les protestans furent ceux qui faisaient partie de

  1. Allier, p. 294.
  2. Cf. Thirion, le Protestantisme à Metz.
  3. D’Argenson, p. 96. Allier, p. 294-295.
  4. Voyez Allier, ch. XV ; « La Contre-réformation organisée. »
  5. M. Allier signale au moins un « air de famille » entre les questionnaires, relatifs aux protestans, dressés par la Compagnie et par l’Assemblée (p. 316-318).