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claies de roseaux jouaient le rôle de ces bourrins ou draps grossiers qu’on étend aujourd’hui sous les arbres et sur lesquels on fait pleuvoir les olives. Comme Caton, Columelle prêche les soins de propreté et recommande de porter au pressoir les fruits récemment cueillis sans les laisser fermenter dans le grenier ; en retardant ainsi l’opération de quelques jours, les olives rendent plus d’huile, il est vrai, pour une même mesure, mais c’est pure apparence, car l’accroissement d’exsudation résulte de la diminution de volume de la chair. Pallade, autre agronome bien postérieur à Columelle, préconise le mois de novembre comme étant le plus convenable à la pressée des olives ; pour tout le reste, il copie ses devanciers en les abrégeant.

Mais les sages préceptes de ces auteurs classiques sont négligés par les cultivateurs du moyen âge. Au XVIIIe siècle, les techniciens français observent déjà que les huiles récoltées en Italie, réputées délicieuses dans l’antiquité, ne valent rien comme goût. En Languedoc, elles laissaient aussi beaucoup à désirer. Thomas Platter, étudiant bâlois, séjourne à Montpellier en 1595 pour étudier la médecine ; il narre ses impressions et n’oublie pas de décrire la fabrication de l’huile. On gaule les olives comme ailleurs les noix, dit sa relation, et nous savons que c’est une détestable pratique agricole. Après les avoir entassées, on les laisse fermenter : autre hérésie. Les moulins ouvrent à la Noël, — nous n’ignorons plus que c’est beaucoup trop tard, — et ne ferment qu’à Pâques. Quelle atroce marchandise devait résulter de semblables manipulations !

En Provence, au contraire, — probablement parce que la région d’entre Aix et Arles était imprégnée jusqu’à la moelle des habitudes romaines, — en Provence, on procédait beaucoup mieux. Nous avons des témoignages favorables et concordans, à cet égard, d’agronomes divers en dissension complète sur d’autres points. Nous pouvons nous en rapporter à l’auteur d’un excellent dictionnaire d’agriculture, l’abbé Rozier, Lyonnais d’origine, mais installé à Béziers, où Young le visita lors de son tour de France : il inspecta minutieusement les huileries de Provence. Nous pouvons aussi feuilleter l’ouvrage très complet de l’abbé Couture sur l’olivier et l’huile intitulé : Traité de l’olivier présenté à nos seigneurs et messieurs les procureurs des gens des Trois-Etats du pays et comté de Provence, destiné à compléter et à rectifier divers mémoires sur le même sujet que l’Académie