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Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 17.djvu/21

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certainement passer du côté de l’adversaire. Et, le 12, il remit une note à Laforest : « Le roi est très fermement décidé à s’en tenir au système de neutralité, le seul conforme aux intérêts de sa monarchie et à ceux de ses voisins... Il maintiendra la tranquillité et le repos du Nord de l’Allemagne... C’est le système le plus favorable à la France ; mais on ne peut se dissimuler qu’il devient très difficile et presque impossible de le soutenir, si l’Electorat de Hanovre reste occupé par les troupes françaises... Que la France remette donc, sans la moindre perte de temps,... le pays de Hanovre à la Prusse... ; qu’elle en retire toutes vos troupes, qu’elle emploiera beaucoup plus utilement ailleurs. »

Cette neutralité, qu’ils cotaient encore à un si haut prix, ils n’en disposaient plus. Le 15 septembre, Alopeus reçut une seconde lettre d’Alexandre pour le roi, la seconde sommation annoncée ; le tsar l’avait signée à Pétersbourg le 4 septembre, avant de quitter sa capitale. Malgré les instances de Czartoryski, il répugnait à violenter un ami si doux, si touchant, si angoissé. Il insistait sur la nécessité de menacer et d’entamer Napoléon de tous les côtés à la fois ; il réclamait l’alliance ; il réclamait, « en attendant, le libre passage » pour ses troupes à travers les États prussiens ; il annonçait son arrivée et il demandait une entrevue « pour nous concerter avec détail sur l’ensemble de nos vues... Je vous garantis des dispositions de l’Autriche... Le sort de l’Europe est entre vos mains. » Le 16, cette missive, ultimatum fraternel et caressant, était entre les mains de Hardenberg. Alopeus supplia ce ministre de la remettre au roi le plus tôt possible. Hardenberg fit un beau geste : — « Vous connaissez depuis longtemps mes principes. J’ai déclaré au roi qu’il ne lui restait plus que le parti de lever le bouclier. — Et contre qui ? interrompit Alopeus. — Eh ! pouvez-vous le demander ? contre la France. » Alopeus déclara qu’il attendrait la réponse jusqu’au 23 ; c’était le terme fixé par la procédure russe et tout, dans le plan, s’exécutait avec méthode. Merveldt, envoyé de Vienne pour concerter une entente, arriva sur ces entrefaites, et Metternich en profita pour pousser à fond Hardenberg et son maître.

Mais, le lendemain, 17 septembre, Duroc et Laforest reçurent des instructions de Napoléon : Bernadotte passera, de gré ou de force, par les États de l’Electeur de Cassel. « Tâchez de conclure. Pourvu que votre traité ne me lie pas les mains pour marcher de suite, je passerai par-dessus tout le reste. » Que