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du monde... » Le prince Rodolphe a débuté en voulant tuer son père et en abandonnant sa fille, née d’un mariage clandestin avec une belle personne de la haute société. Puis, il se repent, devient philanthrope par repentir, et passe ensuite sa vie, comme philanthrope, à parcourir en casquette et en bourgeron les mauvais quartiers de Paris, pour y réhabiliter les scélérats. On le voit, alternativement, en tenue de cérémonie à l’ambassade, où le suit le vieux chevalier Murph tout constellé de décorations, et sous une blouse d’ouvrier dans les tavernes de la Cité, où le même chevalier Murph le suit toujours, mais déguisé en charbonnier... Maintenant, voici l’ancienne femme secrète du prince, la comtesse Mac-Grégor. Séparée de son premier mari, elle en a épousé un second, le comte Mac-Grégor, mort on ne sait comment, mais opportunément, et la comtesse, veuve à propos, s’est en même temps défaite de sa fille, l’enfant du prince, en chargeant un forçat, nommé Bras-Rouge, de l’en débarrasser. Malgré ces relations avec les forçats, d’ailleurs, la comtesse est une des habituées les plus brillantes des soirées diplomatiques, où règnent, avec elle, la marquise d’Harville et la duchesse de Lucenay. Toutes ces dames, qui sont le soir les étoiles de l’ambassade, fréquentent, pendant la journée, une horrible maison borgne dont le principal locataire est précisément le nommé Bras-Rouge, l’ancien galérien qui fait disparaître les enfans ! Les autres habitans en sont une tireuse de cartes, le célèbre ménage Pipelet, et un ex-abbé du nom de Polidori, monstrueux personnage, affligé de vices mystérieux, et empoisonneur en chambre. Comtesse, marquise, duchesse, forçat, empoisonneur, tout cela tripote, fricote, s’entend et collabore, d’après les conseils d’un certain maître Jacques Ferrand, notaire en pied de l’aristocratie, et qui est aussi bien surprenant, comme notaire ordinaire de la bonne compagnie. Avec sa figure de pontife, et sous son masque d’homme austère, il commet, pour le compte de ses cliens, comme pour le sien propre, les plus épouvantables forfaits, avec l’aide habituelle des « pirates d’eau douce r, de l’Ile des Ravageurs, et d’une effroyable mégère nommée la Chouette.

Voilà, n’est-ce pas, d’étranges « gens du monde, » et ceux de Ponson du Terrail sont peut-être, cependant, encore plus étonnans. Un comte Felipone, dès les premières lignes des Drames de Paris, assassine le colonel de Kergatz, afin d’épouser sa veuve. La veuve ignore l’assassinat, devient la comtesse Felipone,