Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 17.djvu/355

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’elle connût alors, la méthode de coercition et de conquête. Les luttes entre la Russie et la Perse étaient fréquentes, et celle-ci devait payer chaque fois les frais de la guerre par des pertes de territoire et des contributions d’argent ; lambeaux par lambeaux les tsars arrachaient aux souverains persans des fragmens de leur domaine. En vain, le fondateur de la dynastie actuelle, Agha Mohammed, avait-il transporté la cour d’Ispahan à Téhéran d’où il se croyait plus à même de surveiller la Russie, lui-même devait céder en 1797 la partie du Daghestan au nord du Kour ; en 1813, Feth Ali perdit le reste du Daghestan et le Chirwan ; en 1828, les khanats d’Erivan et de Nakhitchewan furent également enlevés à la Perse, qui dut encore payer une forte contribution d’argent. Après chaque guerre, le chah se trouvait de moins en moins maître d’orienter sa politique dans un sens défavorable aux intérêts russes, et il était à craindre que la Perse ne tombât complètement sous l’influence ou la domination, de la Russie, quand l’Angleterre, craignant de voir sa rivale devenir maîtresse de la côte de l’Iran et dominer l’entrée du détroit d’Ormuz, réussit à conclure en 1834 avec la Russie un accord par lequel les deux puissances contractantes s’engageaient à maintenir la Perse comme État indépendant. Alors assuré qu’aucun coup de force, qu’aucune surprise extérieure ne viendraient porter atteinte à la situation politique de la Perse, le gouvernement britannique se mit à entreprendre la conquête économique du pays, en faisant porter ses efforts surtout sur les régions de la Perse qui étaient le plus accessibles à son action et dont la possession importait le plus à la défense de l’Inde, c’est-à-dire sur la Perse méridionale qui touche au golfe Persique et à la mer d’Oman. C’est ainsi qu’en 1835, un an seulement après l’arrangement anglo-russe, le gouvernement britannique se fit reconnaître le droit de visite sur les navires persans. Dans le même ordre d’idées fut décidée l’expédition anglaise de l’Euphrate qui, sous la conduite du colonel Chesnay, remonta, en 1836, le cours du Karoun, affluent de ce fleuve, reconnaissance qui fut renouvelée plus tard par le lieutenant Selby. Le major Rawlinson, de 1836 à 1838, explora les parties septentrionales et découvrit la célèbre inscription cunéiforme de Bahistoun tracée sur le rocher au temps du premier Darius, et où le texte est répété dans les trois langues principales de l’ancien empire Achéménide. Cinq ans plus tard fut constituée la fameuse commission