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commerce. » Les jeunes États n’avaient pas la puissance de faire vivant ce rêve de neutralité. Déjà l’Angleterre était jalouse de leur croissance commerciale qui commençait à la mettre en échec. Elle décida que les États feraient alliance avec elle ou qu’elle leur déclarerait la guerre sur l’Océan. Et la France jugea que, si le commerce américain devenait un butin, il fallait en avoir sa part. A dater de 1804, les navires américains ne trouvaient de sûreté contre les canons anglais, même pas dans leurs propres ports. Les bâtimens qui ne naviguaient pas d’après certaines règles s’exposaient à être capturés par les Anglais ; ceux qui satisfaisaient à ces règles-là, devenaient, pour la France un objet de prise. Le garrottement du commerce fut achevé par un décret d’embargo que les États imposèrent eux-mêmes à tous leurs ports. Il fut levé seulement après la capture par les Américains de toute la flotte britannique, dans une dernière bataille, qui finit une guerre commencée en 1812 et continuée jusqu’à la signature du traité de Gand, au commencement de l’année 1815.

Ce fut à la même époque que le pays souffrit, pour la première fois, de troubles intérieurs. Aussi souvent qu’un État nouveau demandait à être admis dans l’Union, la question de savoir si l’esclavage serait maintenu ou non, devenait une occasion de dissentimens entre les sudistes, qui défendaient leurs intérêts, et les nordistes, qui soutenaient un principe. Ceux du Sud, pressentant la dissolution qui finit par se produire en 1861, se hâtèrent d’accroître leur étendue territoriale et le nombre des États esclavagistes. La frontière méridionale des États-Unis était encore en 1819 une colonie espagnole, la Floride. Sous le prétexte de mettre fin aux perpétuelles déprédations causées en territoire américain par les Indiens de Floride, un des généraux, qui avait pris une part active dans la guerre récente contre l’Angleterre, André Jackson, conduisit ses soldats contre les Indiens, en plein territoire espagnol ; il s’empara des villes, obligea leurs gouverneurs à capituler, et fit comprendre nettement à l’Espagne qu’il lui fallait accepter ou le traité offert par les États-Unis ou les conséquences de son refus. Le traité fut signé. Les Espagnols reçurent une indemnité de cinq millions de dollars, et, une fois de plus, les élastiques frontières des États-Unis s’allongèrent.

A titre de compensation, pour les pertes éprouvées durant la guerre avec l’Angleterre, le Secrétaire d’État émit l’idée que le Canada, qu’on avait vainement essayé de conquérir au début de