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de l’argent, la banque, le commerce et le tarif, attirent quantité de jeunes gens que, dans le passé, leurs pères auraient envoyés, dès leur dix-huitième année, dans un bureau, ou dans une usine. On peut dire que le vieil idéal académique est en train de céder aux exigences du commerce.

Le Président Roosevelt disait dans un discours récent : « Le courant des événemens nous a entraînés dans ces deux dernières années à prendre malgré nous une position dans l’équilibre du monde. Que nous le voulions ou non, nous sommes arrivés à un point de notre développement où il nous faut jouer un rôle important dans le concert général. » Il est sûr qu’à ce point de vue particulier, les États-Unis inaugurent un chapitre nouveau de leur histoire. L’erreur de M. Willson dans sa Nouvelle Amérique est d’attribuer ce changement à un empiétement du Pouvoir Exécutif. Le mot « nouveau » est accolé à la bonne moitié des titres de ses chapitres : « La Nouvelle Diplomatie, » « La Nouvelle Politique, » « La Nouvelle Constitution, » « Les Nouvelles Lois, » et lorsqu’on se demande comment ces nouveautés prennent corps, on vous répond : « A mesure que la nation va se développer et que vont grandir les aptitudes de ce peuple au self-government, on le verra se tourner vers la Présidence comme vers le seul organe capable d’exercer la souveraineté. » Et ailleurs : « On verra surgir un dictateur militaire. » Et plus loin : « Le Président dispose de pouvoirs égaux à ceux des monarques d’Europe... On lui donnera plus de pouvoirs. »

Si, dans des conditions égales de fertilité, l’Amérique s’est développée plus rapidement que toute autre contrée, c’est à sa forme politique qu’elle le doit. Son gouvernement stimule, plus que nul autre, l’ambition de chacun de ces citoyens. Il donne à chaque homme le droit de mesurer ses forces sans entraves aux chances de la bataille, et de toucher, sans intermédiaire, les fruits de son travail. C’est à cette liberté que les immigrans qui envahissent l’Amérique doivent leur transformation. Ils commument dans la certitude que l’individu ne rencontrera à son succès d’autre obstacle que la médiocrité de ses dons. C’est cette certitude qui, avec un troupeau international, fait le peuple américain. Il ne témoigne pas, ce peuple, du moindre désir d’augmenter l’autorité du Pouvoir Exécutif. Une Commission a siégé pendant dix ans avec le dessein de renforcer, sur certains points précis, le Pouvoir Fédéral. Elle a échoué, parce que la volonté