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du genre de celui-ci : « Les enfans avaient pour Watteau un charme auquel il était rarement capable de résister ; en vérité, on les a justement décrits comme les Courtisanes de Watteau ! » Ou encore ceci : « Watteau et ses élèves avaient l’entrée-en-famille aussi bien que l’entrée à-la-cour ? »

Et c’est avec une telle connaissance de l’histoire, de la vie, et de la langue françaises, que M. Staley, dans cette grave collection de monographies artistiques, a entrepris de présenter Watteau à ses compatriotes ! Il ne se dispense même pas de leur offrir un tableau général de l’état de la France au début du XVIIIe siècle. « La sculpture, certes, était alors excellente. Mais l’architecture, l’ameublement, la décoration, étaient lourds, convenus, et sans art. La littérature aussi, et la poésie, étaient basses et fades... Le clergé marchait de pair avec le grand monde pour le mépris des lois de la morale et de l’intégrité. Chacun se sentait las d’un régime ennuyeux et stupide. Chacun aspirait à voir revenir les joyeuses journées du Grand Opéra. » Il était temps, en vérité, qu’arrivassent Watteau et son école, ou, pour employer l’expression de l’écrivain anglais, « sa haute-école. »

De notre littérature des XVIIIe et XIXe siècles, en revanche, M. Staley paraît avoir assez bonne opinion : car sans cesse il reproduit les jugemens portés sur Watteau, en vers ou en prose, par C. Moraine, J. Guillaume, P. Bergeret, par d’autres poètes ou critiques dont il ne nous dit point les noms. Tel ce quatrain :


Avec un air aisé, si vif et si nouveau,
Watteau, dans ce qu’il peint, montre tout de génie ;
Que les moindres sujets de son heureux pinceau,
Des grâces, des amours, semblent tenir la vie ;


ou encore ce distique :


O ciseaux enrubannés de Watteau quel joli
Royaume de coquetteries vous railliez !


Mais, dira-t-on, que sont ces vers ? et qui sont ces auteurs ? Les vers, — sauf cependant les deux derniers, qui semblent d’un goût plus moderne, — sont ceux que les marchands d’estampes du XVIIIe siècle faisaient imprimer au bas de leurs planches d’après des tableaux de Watteau ; et Moraine, Guillaume, sans doute, c’étaient des poètes spécialement voués à les leur fournir. Paul N. Bergeret, lui, est de date plus récente. M. Staley nous apprend que c’est en 1848 qu’il a publié Un lettre d’un artiste, où il appréciait en ces termes l’Embarquement