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la proclamation qu’il adressait à ses troupes, à l’ouverture de la guerre sino-japonaise :

« L’ennemi a un caractère cruel et féroce ; si, dans les combats, vous avez le malheur de devenir ses prisonniers, il vous fera subir certainement des souffrances atroces, plus terribles que la mort, et vous fera mourir, après cela, par les procédés les plus barbares et les plus inhumains. Défendez-vous donc de devenir ses prisonniers, quelque périlleux que soit le combat à soutenir. Ne reculez pas devant la mort. »

« Les soldats japonais qui sont faits prisonniers, non seulement sont privés de tout secours, mais ils s’exposent aux massacres et aux mutilations les plus atroces, » déclarait également, en 1895, au cours de cette guerre, un membre de la Société de la Croix-Rouge du Japon.

Au reste, si les grandes puissances procédaient elles-mêmes, chacune en ce qui la concerne, à un examen scrupuleux de conscience, quelle est celle d’entre elles qui pourrait se flatter de n’avoir jamais manqué aux principes du droit des gens ou du droit international ? et déclarer que ses soldats ont eu, toujours et en toute circonstance, au point de vue de l’observation de ces mêmes droits à l’égard des populations ou des armées vaincues, une attitude absolument exempte de tout reproche, non seulement dans le cas d’expéditions dirigées contre les tribus sauvages des différentes parties du monde, mais même dans les guerres poursuivies entre États civilisés ? C’est que les instincts sanguinaires de la brute, qui sommeillent au fond du cœur de chaque créature humaine, se réveillent parfois terribles dans l’ardeur de ces luttes, surtout dans la fureur des mêlées auxquelles elles donnent lieu, en même temps que le sentiment de la conservation pousse le soldat à frapper aveuglément tout ce qu’il croit susceptible d’être encore en mesure de lui nuire. Le sang-froid des chefs, le rappel aux sentimens de générosité et de clémence envers le vaincu, remettent promptement les égarés et les exaltés dans le droit chemin. Ce que nous désirons simplement faire ressortir c’est que, sur ce grand nombre de crimes qui ont naguère ensanglanté la Chine[1], il en est peu d’imputables directement à son armée ! Dans cette campagne,

  1. Le total des étrangers massacrés au cours du mouvement boxer est de sept, à Pékin, et, dans les provinces, de 233 — dont 92 hommes, 80 femmes et 61 enfans, — plus un nombre d’indigènes qui peut être évalué à 30 000.