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traqué d’un côté par les troupes du Sultan, et de l’autre par les colonnes françaises, dut s’avouer vaincu et se rendre à la générosité de ses vainqueurs. L’expédition du général de Martimprey chez les Beni-Snassen, celle du général de Wimpfen dans la région du Béchar et jusqu’à Aïn-Chaïr, en 1870, furent faites en vertu du droit de suite réservé par le traité de 1845, mais avec l’assentiment et le concours du gouvernement chérifien. Ces deux exemples suffisent à prouver que non seulement une politique d’entente et de coopération avec le maghzen n’est pas incompatible avec une action, même militaire, très énergique, dans la zone frontière, mais ils permettent de conclure que c’est précisément pour avoir, depuis 1870, négligé la politique d’action qui doit en être l’accompagnement, que l’on a pu méconnaître les heureux résultats de la politique d’entente. Même après trente-trois ans, après la soumission du Touât, le bombardement de Zenaga et la double expédition qui l’a suivi, notre situation est encore moins bonne, dans le Sud-Oranais, qu’elle ne l’était après la campagne de Wimpfen ; nous expions encore les longues années de tâtonnemens et de velléités inopérantes, où la démolition du bordj de Djénien-bou-Reszg, en 1888, à la requête du Sultan, marque le point d’extrême humiliation. Du moins, si la sécurité du Sud-Oranais ne fut pas assurée, la « question marocaine » ne fut pas ouverte avant l’heure ; non seulement le traité de 1845 fut respecté, mais c’est à la demande même de notre ministre à Tanger, M. Féraud, qu’en 1883 le Sultan envoya un caïd à El-Oudarir, l’un des ksour de Figuig. Ainsi se poursuivait, malgré tout, la politique d’intégrité, d’amitié et de coopération avec le maghzen ; il ne lui manquait que d’être soutenue par les preuves d’activité dominatrice qui en sont la contre-partie nécessaire.

En même temps que, depuis trois ans surtout, la France a repris sa marche en avant dans le Sud-Oranais, poussé son chemin de fer jusqu’aux portes de Figuig et soumis l’ « archipel » du Touât, elle a pu reprendre la politique d’entente et de collaboration avec le maghzen qui, sans avoir jamais été abandonnée, avait subi des éclipses. Ce fut la méthode préconisée par M. Delcassé et appliquée avec bonheur par M. Revoil, comme ministre à Tanger et comme gouverneur général de l’Algérie. La venue à Paris, comme ambassadeurs du Sultan, de deux des principaux personnages de son entourage, Si-Abd-el-Krim-ben-