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d’émigration et de complot. Ils furent en tous cas la cause de l’arrestation de Catus. Les agens chargés de se saisir de lui le trouvèrent le 46 mars, au matin, dans la chambre qu’il occupait chez Hérault de Séchelles.

Quoiqu’il fût d’assez bonne heure, celui-ci était déjà sorti pour se rendre à la Convention. C’est là qu’il reçut un avis de son secrétaire : Catus s’empressait de l’avertir qu’il était détenu au « violon » de la section Lepelletier. Hérault y courut, s’entretretint avec lui en présence de l’officier du poste et lui promit de faire immédiatement des démarches à l’effet de hâter sa mise en liberté. Il revint quelques heures plus tard. Cette fois, il n’était pas seul. Philibert Simond l’accompagnait. Une telle démarche constituait la plus dangereuse et la plus incompréhensible imprudence. La loi interdisait tous rapports avec les prévenus de conspiration, « à peine d’être traité comme leur complice. » En outre, le Comité de Salut public était saisi de l’affaire, et tenter d’entraver son action, c’était courir au-devant de ses rigueurs. La sentinelle préposée à la garde de la prison ayant voulu s’opposer au passage des deux députés, ils aggravèrent leur imprudence en s’autorisant de leur qualité de représentans du peuple pour forcer la consigne et pénétrer auprès de Catus.

À ce moment, arriva un membre de la section Lepelletier, celui-là même qui avait opéré l’arrestation. Il le prit de très haut avec les députés, les sommant de sortir.

— Que faites-vous là ? leur dit-il. Je vous connais ; je sais que vous êtes représentans du peuple. Vous n’êtes pas à votre poste.

Ils durent obéir et se retirer, tandis que le sectionnaire, après avoir grondé la sentinelle, allait rendre compte au Comité de Salut public de ce qui venait de se passer.

Dans ce Comité, dont Hérault de Séchelles savait cessé de faire partie, siégeait Saint-Just, le confident et souvent l’inspirateur de Robespierre, ennemi juré comme lui de l’ami des citoyennes Bellegarde. A sa demande, le Comité de Salut public invita le Comité de Sûreté générale à venir conférer avec lui. Dans ce conseil, l’arrestation de Hérault de Séchelles fut décidée et le mandat rédigé immédiatement : « Les Comités de Salut public et de Sûreté générale réunis, informés par la section Lepelletier qu’un homme prévenu d’émigration, recherché depuis longtemps comme tel, vient d’être trouvé dans l’appartement de Hérault, député ; considérant la gravité des renseignemens reçus sur son