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Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 18.djvu/597

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l’intérieur du pays où elles forment les tronçons de la future grande voie impériale de Singapour à Calcutta. La population, qui n’est encore que de 676 000 habitans, est en voie d’accroissement rapide. Cette heureuse prospérité, les « États fédérés malais » la doivent surtout à leurs riches gisemens d’étain et aux Chinois qui en sont les mineurs. Toute la péninsule de Malacca, les îles du détroit et une partie de Sumatra ne sont, pour ainsi dire, qu’un immense « magasin d’étain. » Depuis longtemps Banka et Billiton, dépendances de Sumatra, fournissent une grande partie de la consommation universelle ; en ces dernières années, grâce à la bonne administration anglaise et à l’affluence de la main-d’œuvre chinoise, la production des « États fédérés » est devenue considérable, elle atteint 60 pour 100 de la production totale du monde[1], avec une valeur de 138 875 000 francs en 1900. Les États fédérés sont donc déjà et deviendront, de plus en plus, le premier pays producteur d’étain.

D’inépuisables réserves de métal sont en outre enfouies dans le sol des sultanats malais qui ressortissent encore à Bangkok : de là l’activité des Anglais, qui veulent être les maîtres de régler la production et les cours de l’étain dans le monde entier, pour faire passer peu à peu les six petits États sous leur tutelle. Ligor, Patani, Kelantan, Tringanou, Kemaman, sur la côte Est, ont de riches gisemens d’étain, sans parler de leurs ressources en bois, gommes et essences précieuses. Kedah s’étend, sur la côte Ouest, jusqu’à l’isthme de Krah : le grande voie ferrée qui fera tout le tour du golfe du Bengale et achèvera d’en faire une mer britannique, doit emprunter son territoire. En dépit de ses prétentions et des efforts qu’il a fait pour y établir son autorité effective, la suzeraineté du Siam ne s’exerce réellement que dans quelques sultanats du Nord, à Kédah, par exemple ; l’envoi, tous les trois ans, des « fleurs d’or, » symbole de vassalité, ou même la présence de quelques commissaires siamois n’est qu’un lien trop faible pour lutter contre l’ascendant de la puissance britannique ; la domination anglaise sera acceptée d’autant plus aisément

  1. En 1900, la production de la région stannifère malaise a été des 4/3 de la production totale, les États fédérés fournissant 42 000 tonnes, Banka, 11 500, Billiton, 4 300, etc.. tandis que l’Angleterre ne donnait que 4 100 tonnes, l’Australie 3 100, la Bolivie 6 900. Au point de vue de la qualité, les étains malais sont les plus purs et les meilleurs. — Voyez, pour ces détails : l’Étain, étude minière et politique sur les États fédérés malais, par Octave J.-A. Collet (Bruxelles, Falk, 1902).