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dessein d’éclairer l’avenir. C’est un regard rétrospectif qui doit décider en dernier ressort des questions de race dans les Assises du XIXe siècle et, par conséquent, ce ne saurait être que celui du psychologue, et du critique historien. Or, par fortune, la race se traduit avant tout dans l’activité intellectuelle et dans l’attitude morale : c’est le cerveau qui en est l’authentique dépositaire : ce sont les « plis de la pensée » (expression empruntée à Renan) qui demeurent en nous immuables, caractéristiques de notre origine ethnique, et responsables de notre conception du monde, comme de sa traduction dans nos actes. Ainsi, M. Chamberlain reconnaît par la seule lecture des œuvres de saint Ambroise et de saint Augustin que le premier était de souche plus pure que le second, et il poursuit : « Sans doute, je ne puis le prouver, mais nul ne saurait prouver le contraire, et c’est donc la personnalité qui doit ici décider. » Ailleurs, accorde-t-il aux Slaves un brevet de germanisme sur l’examen de leurs poésies populaires, il ajoutera : « La critique scientifique viendra pour établir a posteriori le bien fondé de ces impressions de lecture. C’est là son métier. » Qu’elle s’en contente donc ! Quiconque discute les arrêts de l’intuition souveraine est un trouble-fête qu’il faut renvoyer à ses étroites besognes de spécialiste, muré dans sa cellule érudite.

Nous comprendrons mieux que, pour juger autrui, nous possédons un critérium infaillible dans notre appréciation psychologique, si nous savons reconnaître d’abord que, pour prononcer sur nous-mêmes au point de vue ethnique, nous sommes doués par la nature d’une sorte de voix intérieure, d’une véritable conscience ethnologique, qui nous renseigne sur la valeur de notre sang, aussi sûrement que la conscience morale nous parle du mérite de nos actes. (Nous dirons d’ailleurs que ces deux consciences n’en font qu’une au total.) « Quiconque interroge naïvement et d’un cœur simple la Nature maternelle peut être assuré d’en recevoir une tendre réponse, non pas toujours logiquement irréprochable sans doute, mais du moins juste dans son ensemble, compréhensible, et appropriée par une sûre prescience à l’intérêt filial[1]. » En effet, le rejeton d’une race pure l’éprouve chaque jour par un sentiment de bien-être indicible. L’âme de sa race ne l’abandonne jamais : elle le soutient là

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