Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 18.djvu/674

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du wagnérisme. Plusieurs de ses favoris dans l’évolution intellectuelle du moyen âge, Scot Erigène, Duns Scot, le Breton Abélard, nous sont donnés comme de purs Celtes, et, par conséquent, comme de purs Germains. Les brillans descendans des Huguenots français mariés après la révocation de l’Edit de Nantes aux sujets du roi-caporal, viennent prouver de nos jours, à qui connaît les lois darwiniennes du métissage précédemment exposées par nous, combien les deux races ainsi mélangées par les circonstances religieuses étaient certainement proches parentes. Enfin la France, considérée comme celtique, au moins jusqu’au seuil de l’âge contemporain, demeure très sympathique à M. H. S. Chamberlain, qui en écrit si purement la langue, et en comprend si bien l’esprit. Sur le sol gaulois, le croisement celto-germanique a produit « ses plus heureux résultats : » les architectes de l’Ile-de-France sont reconnus sans hésitation dans les Assises du XIXe siècle pour les créateurs du style gothique ; Goudimel, ce calviniste français, est promu chef de l’école musicale germanique ; Racine est finement compris et franchement admiré de cet étranger qui communie par là avec les tendances les plus délicatement nationales du goût français ; et Louis XIV, malgré les souvenirs du Palatinat et des chambres de réunion, reçoit à plusieurs reprises un brevet de germanisme, qu’il doit surtout, il est vrai, à son attitude intransigeante vis-à-vis de Rome.

Ce dernier point prend même sous la plume de M. Chamberlain une telle importance qu’on se demande s’il ne salue pas dans notre pays, les inspirations les plus germaniques à l’auteur du XXe siècle. Voltaire est encore un pur Germain en ce sens anti-ecclésiastique, et aussi parce que ses œuvres ont le privilège d’amuser l’auteur des Assises. Enfin l’élan brutal de la Révolution à ses débuts sortirait de la plus noble origine ethnique : le paysan français s’est soulevé en 1789 « avec la fureur proverbiale du Germain qui a trop longtemps patienté. » Comment donc se fait-il alors qu’au lendemain de cette manifestation, non douteuse, de leur race, les représentans du peuple gaulois aient élaboré la Déclaration des Droits de l’homme, dont M. Chamberlain parle avec tout le mépris d’un impérialiste, révolté dans ses convictions anti-égalitaires ? Ce monument du plus néfaste humanitarisme est déclaré par lui sans ambages l’œuvre « du peuple le plus phraseur de l’Univers dans sa plus phraseuse période. » Il est vraiment bien difficile d’expliquer