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en partie aux documens publiés et aux travaux des historiens. A côté d’êtres cupides et cruels, il a paru, parmi eux, des héros, presque des grands hommes. Dans les origines de la France, le brigandage a joué un rôle considérable, et ce rôle n’est sans doute pas fini ; seulement, au lieu que les brigands exercent, comme autrefois, le pillage en armes, ouvertement, ils le pratiquent sournoisement aujourd’hui, et le droit nouveau établi par les théoriciens du changement perpétuel ne leur est plus contesté par le possesseur du fief : M. Frantz Funck-Brentano a corrigé la légende par l’histoire avec l’érudition que l’on sait. Les dessins et planches en couleurs de M. A. Paris sont très vivans et mouvementés.

Dans les récits que l’on trouve beaucoup de plaisir à relire, parce qu’ils sont gais, de bon ton, généreux, émouvans, relevés par le charme du style, d’une observation toujours juste et délicate, d’une imagination finement colorée, il n’en est pas de plus vivant que les Lettres de mon moulin[1], cette pittoresque ruine aux ailes mortes pour laquelle Alphonse Daudet s’était épris d’un véritable amour. C’est de là qu’il a daté quelques-uns de ses plus jolis contes, où il a mis le bourdonnement qui lui restait aux oreilles de ces chants, de ces rires clairs, de ces féeriques légendes, un reflet aussi de ce soleil vibrant de Provence, du parfum de ses collines brûlées. A tous ces souvenirs des Alpilles, des Aliscamps, des Baux, de Châteauneuf-des-Papes, de Maillane, il se laisse aller avec la gaîté d’une âme légère, avec la fantaisie d’un artiste qui s’abandonne à l’impulsion de son tempérament foncièrement sympathique et toujours plein de compassion pour toutes les souffrances. C’est ainsi que, dans les Lettres de mon moulin, il nous entraine et nous séduit par la vivacité de son esprit, la sincérité de son observation, son ironie si fine, son imagination si fertile, sa poétique rêverie. C’est assez pour que cette œuvre souple et gracieuse ait la vogue ; mais elle est de plus illustrée par deux artistes de grand talent, MM. G. Fraipont et José Roy, que les sujets ont vraiment bien guidés dans leurs dessins et aquarelles.

Dans l’histoire des grandes explorations, les expéditions au Pôle Nord montrent ce que peuvent la volonté, le sang-froid, unis au courage et à la persévérance. Mais, quelles que soient les vicissitudes essuyées par la plupart d’entre elles, le problème capital de la navigation hyperboréenne ne cesse de solliciter ceux qui, poursuivis par l’obsession polaire, veulent percer le mystère dont s’enveloppe le

  1. Ernest Flammarion.