Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 20.djvu/129

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que sur ses propres moyens. La plupart du temps, il sera soutenu par l’action de l’artillerie, mais il ne doit pas attendre que celle-ci lui ait ouvert la voie. Croire que l’artillerie seule peut ouvrir le chemin à l’infanterie est une idée fausse et des plus dangereuses.

Une infanterie qui, pour avancer, attendrait que l’artillerie eût éteint le feu ennemi, s’immobiliserait indéfiniment. Tant qu’il passerait des projectiles, elle trouverait la préparation insuffisante. La superposition des feux de mousqueterie et d’artillerie peut faciliter la marche, mais il faut que l’essaim ne compte que sur lui-même, et soit résolu à s’ouvrir le chemin à coups de fusil. L’artillerie aide l’infanterie, elle lui rend la tâche moins dure ; elle ne peut pas l’en exempter.

Arrivé aux courtes distances, l’essaim de tirailleurs progresse en jetant en avant de lui ses meilleurs fusils, qui, par un feu bien dirigé, protègent le mouvement des autres et leur permettent de les rejoindre. L’essaim progresse ainsi, par des mouvemens successifs dont l’amplitude varie d’après les distances, d’une position favorable au tir, à une autre position. Quelle souplesse ne faut-il donc pas au tirailleur ? Il est dorénavant impossible de songer à le faire combattre sac au dos.

Les essaims doivent être encadrés d’autant plus solidement qu’ils sont composés de soldats moins aguerris. Il semble qu’au début d’une campagne, on ne doive pas descendre au-dessous de la section, 50 fusils environ. En Angleterre, où les cadres sont nombreux, le groupe est formé de 25 fusils. Ce nombre est évidemment préférable, mais nos énormes effectifs, composés en majeure partie de réservistes, ne nous le permettent pas. Après quelques combats, on pourra descendre à la demi-section, et même au-dessous avec de vieilles troupes, telles que la légion étrangère ; mais l’expérience seule devra guider.

Avec des groupes de 50 fusils, le commandement sera souvent difficile. Tant qu’on ne sera pas arrivé aux courtes distances de fusillade, c’est-à-dire 400 et 350 mètres, il y aura souvent intérêt à ne pas mettre sur la ligne de feu les 50 fusils de la section. L’essaim devra quelquefois garder un front étroit pour mieux assurer l’action du commandement, et le chef de section mettra en ligne deux, trois escouades selon le terrain, tandis qu’à la position suivante, il n’en mettra peut-être qu’une seule, s’il ne peut employer utilement un grand nombre de fusils. Les