dans la théorie comme dans la pratique, toute l’importance que nous leur voyons aujourd’hui.
Cette importance, si prodigieusement accrue, peut se mesurer au simple fait que, là où Montesquieu n’a rien dit, où Delolme s’est contenté de quelques lignes vagues, et Tocqueville d’un court chapitre, aujourd’hui M. James Bryce consacre un volume entier[1] et M. Ostrogorski, deux gros volumes[2], à démonter et à décrire la mécanique des partis, considérés, en vue de l’utilisation, de la domestication, et malheureusement aussi de l’exploitation de la grande force aveugle qu’est le nombre, comme les pièces maîtresses de la « machine » de l’Etat. par-là se trouve posé un problème de l’intérêt le plus haut et le plus pressant, dont les données multiples sont : les conditions du régime parlementaire, le but légitime des partis, la fin même de l’Etat, d’une part ; et, d’autre part, l’extension du droit de suffrage, ou le développement de la démocratie. Une telle question vaut sûrement qu’on l’examine, sinon dans toute son ampleur et toute sa portée, ce qui serait fort difficile, du moins sans trop la rétrécir ni la rapetisser. Essayons donc de montrer ici ce que devraient être les partis, au gré du juriste et du philosophe ; ce qu’ils ont été dans l’histoire, ce qu’ils sont dans la vie, ce qu’ils peuvent être dans la réalité ; comment le développement de la démocratie, l’extension du suffrage, a agi sur leur formation, sur leur composition, sur leur direction ; comment, d’organiques qu’ils étaient d’abord dans l’Etat hiérarchisé, — dans l’Angleterre d’avant 1832, par exemple, — ils sont, quand on a lâché le nombre à travers l’Etat égalisé, quasi nécessairement devenus mécaniques ; comment enfin une tendance se dessine à compléter, ou compenser, et à remplacer les partis politiques permanens, à objet illimité, par des groupement politiques temporaires, à objet bien déterminé.
Pendant longtemps l’opinion commune a tenu l’existence des partis pour un mal, auquel on ne se résignait que faute de