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« Je voudrais, dit-il, avoir l’état de ce qui fut trouvé à Grandson dans le camp du Duc, état qui a été publié en 1790. Je n’ai aucune foi au dire des chroniqueurs suisses qui parlent de 400 à 500 canons ; d’après les chroniques bourguignonnes, il en a perdu 113, ce qui est déjà beaucoup pour une armée de vingt mille hommes. »


Nous touchons à la fin de la captivité de Louis-Napoléon. Il fait imprimer l’avant-propos de son ouvrage[1] et l’envoie au colonel Dufour Mais la publication va se trouver interrompue par les événemens qui aboutissent à l’évasion de Ham. Il écrit le 28 janvier 1846 :


« Vous avez raison d’être étonné de mon silence ; mais, si vous saviez combien j’ai été tourmenté tous ces temps-ci, vous m’excuseriez d’autant plus que je ne pouvais vous dire quelque chose de positif sur mon sort futur. Voici les faits. Mon père, sentant sa santé s’affaiblir, a fait des démarches pour qu’on me permît d’aller auprès de lui. On a répondu qu’il fallait que je donnasse quelque garantie. J’ai alors écrit au ministre de l’Intérieur que, si on me permettait d’aller auprès de mon père, je promettais de revenir me constituer prisonnier à la première sommation. Le ministre m’a fait répondre que cela serait une grâce déguisée et que la grâce dépendait du Roi seul. En dessous, on me fit dire également que, si je m’adressais au Roi, ma demande serait accordée. Je me décidai donc à renouveler la même proposition au Roi. Celui-ci la reçut avec une grande bienveillance, dit que la garantie que j’offrais était suffisante, et s’apitoya sur la santé de mon père. Puis, le 23 janvier, je reçus une dépêche du ministre de l’Intérieur, qui contenait ces mots révoltans : Pour que la clémence du Roi puisse s’exercer, il faut que la grâce soit méritée et franchement avouée. Je m’empressai de faire connaître cette belle réponse aux députés éminens de toutes les nuances et tous en ont été indignés ! Aussi je ne considère pas la question comme résolue encore. »


La solution à laquelle il s’arrêta, ce fut de travailler lui-même à se v remettre en liberté, et, quelques mois plus tard, le 25 mai 1846, eut lieu l’évasion dont nous n’avons pas à rappeler les circonstances.

  1. Études sur le passé et l’avenir de l’artillerie. Ce travail, que nous avons mentionné plus haut, est en deux volumes : le premier parut en 1846, mais le second ne devait voir le jour qu’en 1851, alors que Louis-Napoléon était président de la République.