Dufour, avec une inépuisable complaisance, cherchait à satisfaire aux demandes de son correspondant. Et, cependant il avait à cette époque bien d’autres préoccupations. En effet la campagne du Sonderbund, dont nous avons parlé au début de cet article, fut précédée et préparée, en Suisse, par une foule de graves incidens.
« Vous êtes bien bon, écrit Louis-Napoléon le 14 février 1845, de vous occuper de mes recherches archéologiques, lorsque vous devez être si tristement affairé par les graves événemens qui se préparent en Suisse. Espérons que tout se calmera sans effusion de sang. Il serait bien cruel de voir, au XIXe siècle, les guerres de religion se renouveler dans un État libre ! »
Mais le prince, tout entier à ses études favorites, n’en continue pas moins à recourir aux bons offices de Dufour. Il lui écrit, le 24 mars :
« Je voudrais, si cela est possible et pas trop cher, que quelqu’un me fît le travail suivant. D’après le récit d’auteurs contemporains, trouver combien de bataillons les Suisses avaient fourni soit à Grandson, soit à Morat, et plus tard à Novare et à Marignan ; sur combien d’hommes de profondeur étaient ces bataillons ; comment étaient disposés les piquiers, les hallebardiers, et les coulevriniers (handbuchsenschüzen) ; enfin, si ces batailles étaient sur une ou plusieurs lignes. Voilà tout ce que je désire savoir…
J’ai trouvé dans les cahiers de la Société des artificiers de Zurich quelque chose de curieux, et, puisque vous êtes à Zurich, vous me feriez grand plaisir de vous informer de quel auteur est tiré le passage suivant (ann. 1828, p. 8) : « Au XIIe siècle, il paraît qu’on employait aux mines, près de Goslar, la composition de salpêtre, soufre et charbon, pour faire sauter des rochers ; et, au commencement du XIIIe siècle, le fils d’Henri Cœur de Lion (je pense que c’est d’Henri VI dit le Cruel, empereur d’Allemagne, qu’il est ici question) employa une semblable composition pour renverser un mur de forteresse. » Si les auteurs originaux où sont pris ces renseignement peuvent se trouver à la Bibliothèque royale de Paris, je n’ai besoin que d’en savoir le titre ; sinon, je voudrais pouvoir me procurer les passages originaux. »
Quelques jours plus tard, le 28 mars, il écrit de nouveau pour tâcher d’éclaircir un point, à propos de Charles le Téméraire.