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à la faible importance de l’organe. Il est certain que l’opération n’avait pas été complète. Les extirpations du pancréas ont été tentées maintes fois vainement. On attachait un grand prix à leur réussite ; elles échouaient toujours et l’animal succombait aux suites de l’opération. Ce n’est qu’en 1889, plus de deux siècles après les prétendues extirpations de Conrad Brunner, que deux physiologistes allemands, von Mering et Minkowski parvinrent, grâce à l’application de l’antisepsie chirurgicale, à conserver des animaux ayant subi cette ablation. Et, pour le dire en passant, ces expériences contemporaines ont complété d’une manière remarquable l’histoire physiologique et pathologique du pancréas. Elles ont, en effet, révélé la part considérable qui revient à cet organe dans la formation du sucre chez les animaux : en même temps, elles ont fait connaître la cause de l’une des formes graves de la maladie du diabète. Du coup, le pancréas, dont on savait déjà le rôle prépondérant dans la digestion, acquérait une importance nouvelle et tout à fait de premier ordre parmi les organes essentiels de l’économie.


Mais, il ne s’agit point ici de l’intervention du pancréas dans la fonction glycogénique et dans le diabète, qui est un dérèglement de cette fonction. Ce qui nous importe, c’est son rôle dans la digestion et spécialement dans la digestion des albuminoïdes (ou de l’albumine, comme on dit par abréviation) ; c’est la manière dont ce rôle a été successivement connu ; c’est, enfin, l’histoire de la substitution du pancréas à l’estomac comme instrument prépondérant de la transformation chimique des alimens.

Il faut arriver pour cela presque à l’époque contemporaine. Jusque-là, on a enseigné et répété partout l’opinion de Galien : que le pancréas était une sorte de glande salivaire égarée dans l’abdomen. De fait, sa structure et son aspect sont à peu près ceux de la glande parotide ou de la glande sous-maxillaire. Les unes et les autres appartiennent à la même catégorie des glandes en grappe. En réalité, il ne faut pas dire que la structure microscopique en est absolument la même, mais seulement qu’elle a paru telle jusqu’au jour où l’on est entré dans l’extrême détail histologique, et où l’on a décrit entre les culs-de-sac de cette glande en grappe, disposés, en effet, comme ceux des glandes salivaires des îlots cellulaires spéciaux, les îlots de Langerhans, que les anatomistes actuels, et particulièrement M. Laguesse, ont contribué à nous bien faire connaître. D’ailleurs, c’est une vérité sur laquelle les anatomistes n’ont jamais cessé d’insister que les ressemblances