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mis si sérieusement aux hiéroglyphes et aux antiquités égyptiennes ; que je ne vais pas en Égypte, — cette année ; — j’en savais assez pour un voyage d’amateur, j’en veux savoir davantage pour un voyage d’étude. Ainsi, si le cœur vous en dit, l’année prochaine ; peut-être, aurons-nous Mérimée, qui, cette année, va à Alger ; — pour moi, je vais faire une passegiata en Italie. A Turin d’abord, voir le musée égyptien avec M. Lenormant, puis à Florence, voir Capponi. Si vous pouviez faire un trip jusque-là, ce serait admirable. Mais tout dépend de la santé de Madame votre mère et de vos projets. Vous triomphez sur toute la ligne, — le duc de la Victoire est aussi enfoncé qu’il soit possible de l’être. Venez donc triompher ici avant mon départ.

M. de Chateaubriand est revenu en bon état des eaux, — il est allé depuis à La Trappe, tout cela très lestement, très juvénilement. Mme Récamier est un peu souffrante, et vous serez pour elle un bien heureux événement. Vous me trouverez déjà déchiffrant assez bien et pouvant lire presque à obélisque ouvert.

Mille amitiés bien sincères.

J. -J. AMPERE.


Je me suis un peu étendu sur la jeunesse de Lavergne pour montrer dans quel milieu littéraire, politique et mondain il avait vécu, formant un contraste absolu avec l’existence toute de science et de solitude qu’il mènera plus tard. Ce changement imprévu avait frappé les personnes qui l’ont connu dans cette première partie de sa vie. Mme Lenormant y fait allusion dans les souvenirs qu’elle a publiés sur Mme Récamier. Après avoir cité Lavergne comme un des familiers de l’Abbaye-au-Bois, elle ajoute :


Il avait beaucoup d’esprit, un vrai talent de style, la passion de la politique. On ne se doutait guère alors et il ne se doutait pas lui-même qu’il deviendrait le grand orateur de l’Agriculture.


Tout entier désormais à la politique, Lavergne y voulut tout de suite marquer sa place ; en 1842, il se présentait à la députation dans le département du Gers, pour l’arrondissement de Lombez. Il fut bien près de réussir, car il n’échoua que d’une voix contre un candidat légitimiste, M. de Panat. Deux ans après, M. Guizot, séduit par les qualités à la fois brillantes et solides du jeune écrivain, résolut d’en faire un auxiliaire de sa politique ; il l’appela au ministère des Affaires étrangères, en qualité de sous-directeur. Cette même année 1844, Lavergne épousait Mlle Delalande,