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Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 21.djvu/238

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La France, disons-nous, amie de l’Angleterre. En effet, avec l’Angleterre aussi ses relations viennent de se resserrer à la suite des conventions et arrangemens que nous avons annoncés il y a quinze jours, mais qui venaient à peine d’être signés alors, et dont il nous a été impossible de parler comme il convenait.

Nous ne le pouvons même pas aujourd’hui : le cadre d’une seule chronique est trop étroit pour cela. Nos arrangemens avec l’Angleterre touchent à une infinité d’objets : nous devons nous contenter d’en indiquer le sens général. Dans leur ensemble, ils nous ont paru équitables, et il faut bien qu’ils le soient puisqu’ils ont été accueillis favorablement des deux côtés du détroit. Ceux mêmes qui, en France, ont une tendance naturelle et en quelque sorte instinctive à croire que, dans tout accord avec l’Angleterre, nous devons nécessairement avoir été dupes, se sont tus cette fois ou n’ont exprimé que de timides réserves. Aussi gardons -nous toute notre liberté d’esprit pour reconnaître ce qu’il y a de satisfaisant et d’heureux dans le fait même que la France et l’Angleterre aient pu résoudre d’une manière amicale et loyale la plupart des difficultés pendantes entre elles. Nous avons toujours été partisans de cette entente, qu’on appelait autrefois cordiale, entre les deux pays : on y a mis longtemps bien des entraves, et nous ne rechercherons pas à qui la faute en est particulièrement imputable. Ce qui vient de se faire aurait été impossible il n’y a pas encore beaucoup d’années, peut-être même beaucoup de mois. Pourquoi ? Est-ce parce que les questions n’étaient pas les mêmes ? Non apparemment : ce ne sont pas les choses qui ont changé, mais les hommes, et on a vu alors qu’il n’y a rien d’impossible à une bonne volonté forte et sincère, ou plutôt à deux volontés de ce genre lorsqu’elles agissent en commun. On assure qu’au-dessus de toutes, celle du roi Edouard VII s’est exercée d’une manière active et efficace : les deux pays doivent lui en savoir gré. Nous parlions en effet, il y a un moment, des conditions les plus propres à maintenir dans le monde ce qui y reste encore de paix, et sans doute le rapprochement de la France et de l’Italie fera beaucoup pour cela ; mais l’amitié de la France et de l’Angleterre apparaît, pour la solution de ce problème, comme un facteur d’une puissance prépondérante, lorsqu’on songe qu’elles ont l’une et l’autre de grands intérêts en Extrême-Orient ; que l’une est l’alliée de la Russie et l’autre l’alliée du Japon ; et qu’elles peuvent, à un moment donné, contribuer à la cessation de la guerre ou au règlement de ses conséquences. Nous n’en sommes malheureusement pas encore là. Mais, avec un présent troublé et un avenir incertain,