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Benedetti dit qu’il ne croyait pas le lieu bien choisi pour une conservation sérieuse, et voulut prendre congé ; mais Bismarck le retint, en lui exprimant ses regrets de n’avoir pu le recevoir jusque-là. Il l’entretint longuement de la négociation sur Rome : « Le gouvernement français pouvait avoir le droit et peut-être le devoir de sauvegarder le pouvoir temporel ; la Prusse n’était pas dans la même situation, et il ne fallait compter sur aucune garantie de sa part. Göltz, en faisant entrevoir l’espérance du contraire, avait méconnu les intentions de son gouvernement. Il avait, sans doute, cédé, à Compiègne, au désir de ne pas déplaire à l’Empereur, autant qu’à la vaine satisfaction de concourir à la rédaction d’un traité[1]. »


IV

Une des deux négociations était donc définitivement écartée.

Un discours de Bismarck à propos du Sleswig-Holstein parut donner quelque espoir sur la seconde. Avant les vacances, les annexions des pays conquis avaient été votées, sauf celle du Sleswig-Holstein. Le Landtag l’adopta le 20 décembre 1866. Le député Groote, s’était élevé contre le principe barbare de la conquête appliqué à des pays allemands et aurait voulu que le suffrage universel eût été consulté. Bismarck revendiqua le droit de conquête qui lui était si cher : « Dans le Sleswig-Holstein ce droit est plus fort que dans le Hanovre, il est double. Nous avons conquis ces duchés, d’abord sur les Danois, puis sur le prince d’Augustenbourg. Admettez que le prince fût effectivement souverain légitime. Il a été pendant la guerre l’allié de nos adversaires aussi bien que le roi de Hanovre et l’électeur de Hesse. »

Il reconnaissait que l’article du traité de Prague était désapprouvé par le sentiment public et, en apparence, en contradiction avec les succès éclatans de la Prusse. « Mais il a été une condescendance exigée par la pression du médiateur Napoléon III, Nous n’avons pas voulu tendre l’arc trop fort et compromettre des avantages obtenus. » « Ces engagemens, nous devons les remplir, mais nous les exécuterons de telle manière qu’il ne reste aucun doute sur le vote des populations d’après lequel nous procéderons, aucun doute sur la sincérité, sur l’indépendance de

  1. De Benedetti, 20 décembre.