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Valette agissait auprès de l’Impératrice, ravivait ses scrupules, menaçait de sa démission et de celle de Rouher. Magne trouvait l’Empereur troublé.

Dans un conseil tenu le 17, il exposa néanmoins son plan de réformes. Ce fut un tolle général, comme il n’y en eut jamais depuis le commencement du règne. Baroche surtout fut véhément. « Nous en reparlerons une autre fois, » dit l’Empereur. Et il leva la séance[1]. Dans la journée du 18, Rouher et Fould eurent de longues conférences avec lui. Ils ne le détournèrent pas. Le 19 au matin, il réunit ses ministres, les remercia de leur zèle et leur demanda leur démission qu’ils donnèrent immédiatement de vive voix. Puis il envoya au Moniteur officiel une lettre annonçant les réformes, qui fut insérée dans le numéro du 20 janvier.

« Monsieur le ministre, on se demande si nos institutions ont atteint- leur limite de perfectionnement ou si de nouvelles améliorations doivent être réalisées ; de là une regrettable incertitude qu’il importe de faire cesser. — Jusqu’ici, vous avez dû lutter avec courage en mon nom pour repousser des demandes inopportunes et pour me laisser l’initiative de réformes utiles lorsque l’heure en serait venue. Aujourd’hui, je crois qu’il est possible de donner aux institutions de l’Empire tout le développement dont elles sont susceptibles et aux libertés publiques une extension nouvelle sans compromettre le pouvoir que la nation m’a confié. Le plan que je me suis tracé consiste à corriger les imperfections que le temps a révélées et à admettre les progrès compatibles avec nos mœurs, car gouverner c’est profiter de l’expérience acquise et prévoir les besoins de l’avenir. — Le décret du 24 novembre 1860 a eu pour but d’associer plus directement le Sénat et le Corps législatif à la politique du gouvernement, mais la discussion de l’Adresse n’a pas amené les résultats qu’on devait en attendre ; elle a, parfois, passionné inutilement l’opinion, donné lieu à des débats stériles et fait perdre un temps précieux pour les affaires ; je crois qu’on peut, sans amoindrir les prérogatives des pouvoirs délibérans, remplacer l’Adresse par le droit d’interpellation sagement réglementé. — Une autre modification m’a paru nécessaire dans les rapports du gouvernement avec les grands corps de l’État ;

  1. Carnet de Vaillant, 17 janvier 1867.