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Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 22.djvu/320

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l’état d’esprit où l’on était en France, on jugerait non seulement acceptables, mais excellentes. On l’engagerait de la sorte dans une impasse, et le moindre effet en serait de creuser davantage la séparation entre lui et les Français. S’il acceptait un congrès, on lui rendrait de plus en plus difficile d’y repousser les conditions nouvelles qu’on y élèverait, et, s’il rompait, on aurait eu le temps de se mettre en mesure de lui dicter la paix. Il aurait perdu les avantages de l’offensive, la supériorité du nombre, l’entrain à la guerre et la confiance de l’armée.

« Le passage de la neutralité à la guerre ne sera possible que par la médiation armée, » avait dit Metternich à son maître. Il en était à franchir ce pas. Le 7 mai, il dressa des instructions pour le comte de Stadion, qu’il dépêcha près d’Alexandre. Il y développait ses vues sur les bases de la paix à proposer à Napoléon. C’étaient : 1° la suppression du duché de Varsovie et le retour, en ce qui concerne l’Autriche, aux conditions antérieures à 1809 ; 2° la restitution à la Prusse de ses anciennes possessions dans l’Allemagne du Nord ; 3° l’abandon par la France de tout ce qu’elle possède en Allemagne, au-delà du Rhin ; 4° le royaume d’Italie hors des mains de Napoléon ; 5° la Hollande indépendante, la restauration du Pape ; 6° la restitution de toutes les provinces françaises en Italie ; 7° pour l’Autriche, la frontière d’avant Lunéville, le Mincio ou l’Oglio, plus le Tyrol, le Quartier de l’Inn, l’Illyrie, la Dalmatie. et la restitution de tout ce que lui avait enlevé, de ce côté-là, le traité de 1809. Voilà, dit-il, les conditions d’une bonne paix continentale ; mais il reconnaît qu’on doit distinguer un minimum et un maximum, selon 1ns chances de la guerre. Sur la guerre même, il s’exprime nettement : « Le comte de Stadion prouvera que nous aspirons avant tout à rapprocher le terme, ou par un prompt accord avec les puissances, ou par des opérations qui nous permettent de porter nos forces hors des frontières. » A l’appui, Stadion produira des « devis militaires qui ne laisseront rien à désirer à l’empereur Alexandre sur les détails des mouvemens de notre armée… Il ne négligera rien pour amener une négociation instantanée, et pour convenir des bases d’une coopération active militaire de notre part dans le cas de la non-réussite de nos soins en faveur de la paix. » Le même jour, François écrit au tsar. — Il forme des vœux pour un arrangement pacifique, mais il ajoute aussitôt : « Nos forces réunies, dirigées d’après un point de vue fixe, et dans l’accord le plus