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Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 22.djvu/856

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persuadée que vous recevrez toutes sortes de bons traitemens de moi à l’avenir, et que je vais songer à votre établissement. M. de Savoie est un bien meilleur parti qu’il n’était : sa mère est morte. Il connaîtra la différence qu’il y a de votre sœur à vous. Ainsi vous serez fort heureuse et j’y travaillerai sérieusement. » Ce discours fut suivi d’un échange d’effusions. « Nous venons de nous embrasser, ma cousine et moi, » dit le Roi en reparaissant devant sa Cour, et le mot d’ordre fut saisi au vol. La Grande Mademoiselle eut à Fontainebleau une semaine quasi triomphale. Rentrée dans sa province, elle ne sut malheureusement pas s’y tenir en repos.

Le Roi, ses ministres et ses ambassadeurs travaillaient à son mariage. Il n’y avait qu’à les laisser faire. Mademoiselle voulut les aider. Pour commencer, elle entreprit de réduire au silence la vieille Madame, qui était outrée de son empressement à remplacer sa cadette. Il en résulta de telles criailleries, que Louis XIV dut intervenir pour faire taire toutes ces femmes. Il écrivit à Mademoiselle :


A ma Cousine.

« Ma cousine, je ne puis pas empêcher que les gens de ma tante ne parlent, mais je ne crois pas qu’elle dise que je lui aie promis ma protection contre vous. Je vous aime et vous considère, autant que les plus pressans motifs qui passent dans votre esprit sont capables de m’y convier. Et assurément mon intention est de vous faire plaisir en tout ce qui se pourra. Je vous avoue seulement que vous m’en ferez beaucoup, si vous voulez de votre part faciliter les choses un peu ; c’est en cela que consiste toute ma partialité : Et n’ayant rien à ajouter à une explication si sincère de mes sentimens, je finis cette lettre, priant Dieu, etc.

« Écrit à Fontainebleau le 12e juillet 1664.

« Signé : Louis[1]. »


Il était au-dessus des forces de Mademoiselle de ne pas s’en mêler. Sa persévérance à faire la mouche du coche lui attira une

  1. Œuvres de Louis XIV. — Lettres particulières, Paris, 1806.