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professionnel. C’est là une protection des plus sérieuses, le monopole étant à la fois intérieur et extérieur. La pêche est en effet interdite aux étrangers sur toute l’étendue des côtes, dans la limite de trois milles marins au-delà de la laisse de basse mer. De plus, des droits de douane frappent les produits de la pêche étrangère. Les inscrits sont en outre exemptés, comme il a été dit plus haut, de la patente pour l’industrie de la pêche. Ils obtiennent des primes d’armement, ils ont la franchise pour les sels employés à la conservation du poisson pris par eux, etc.

Le second des monopoles importans concédés aux inscrits est celui qui leur réserve la composition de la presque intégralité des équipages de la marine marchande. On peut le considérer comme la plus substantielle des compensations pour les charges résultant de la situation spéciale où la loi les a placés.


II

Ce monopole résulte de la législation qui, dans l’industrie de la navigation de commerce, régit les relations entre employeurs et employés, c’est-à-dire entre les patrons, compagnies ou armateurs, et le personnel de leurs bâtimens. Les règles particulières auxquelles est soumise ainsi cette industrie sont définies à la fois dans la législation de la marine marchande et dans celle de l’inscription maritime. Le monopole concédé aux inscrits consiste en ceci que la loi impose aux armateurs de n’admettre dans leur personnel marin français que des inscrits, et qu’ils ne peuvent armer leurs bateaux avec des étrangers, dans les cas où cette facilité est concédée, que dans la proportion maximum d’un quart de l’équipage. Une telle prescription, qui fait bénéficier les inscrits d’un privilège fort avantageux, constitue en revanche pour les armateurs une obligation très onéreuse, et il est probable que, tout compte fait, la plupart d’entre eux préféreraient le système du recrutement libre. En fait, les faveurs concédées aux inscrits sont, ou directement conférées par l’État, ou prennent naissance dans les obligations que celui-ci impose aux armateurs.

La raison d’être de ce traitement privilégié ne saurait être seulement que l’État, s’étant arrogé la tutelle des inscrits maritimes, les suit avec sollicitude dans toutes les étapes de leur vie civile, et cherche, après avoir exigé d’eux un temps île service actif, à les indemniser en diverses façons des rigueurs de ce