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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 décembre


Le ministère continue de se survivre. Il a encore une majorité qui oscille entre deux et onze voix, dans le nombre desquelles il faut compter les siennes propres. Comme il y a six ministres et un sous-secrétaire d’État députés, cela fait sept voix qui sont toujours pour lui un appoint assuré, sans lequel il serait déjà par terre. On peut donc dire qu’il s’est sauvé lui-même à plusieurs reprises, non pas par son éloquence, certes ! mais par les sept bulletins de vote dont il dispose. Il est très ébranlé et reste à la merci du moindre incident, mais enfin il est encore à peu près debout. M. le président du Conseil, dont la modestie est bien connue, a expliqué le phénomène à sa manière. — C’est, a-t-il déclaré, parce que derrière ma personne il y a une politique, et que cette politique ne manquerait pas de disparaître avec elle. Alors c’en serait fait pour longtemps des réformes démocratiques attendues par le pays avec impatience ; le parti républicain se disloquerait incontinent et la République elle-même serait en danger. — Qui aurait cru que tant de choses, et de grandes choses, tinssent à la personne de M. Combes ? Il a tracé le tableau effrayant de la décomposition politique qui suivrait sa chute. « Un espère, a-t-il dit, par une conjonction des centres, arriver à la formation d’une majorité nouvelle. On se berce de cette douce illusion. Eh bien ! soit, messieurs : quelle sera cette majorité de demain quand vous en aurez exclu, — et vous le feriez certainement, — un ou deux groupes de la gauche de cette assemblée ? Vous figurez-vous que les deux ou trois autres groupes resteront indifférens à cette exclusion ? Ils ne le peuvent pas, vous ne l’ignorez pas. Les quatre fractions de la majorité se sont unies sur un programme commun, et seules ces quatre