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pourtant ces nouvelles pratiques qu’après la mort de Fouquet ; Lauzun était alors presque au bout de ses peines.

La mort de son frère aîné, survenue en 1677, avait entraîné un changement considérable dans sa situation. Lauzun devenait chef de famille. Sa sœur, Mme de Nogent, représenta au Roi qu’il y allait « de la conservation de sa maison, » que M. de Lauzun pût donner ordre à ses affaires, et elle n’eut aucune peine à se faire écouter. Autant l’individu comptait peu, autant « la maison » était pour ainsi dire chose sacrée, même aux yeux de Louis XIV. Saint-Mars eut commandement de recevoir Mme de Nogent, un autre de ses frères, le chevalier de Lauzun, et leur avocat, M. Isarn, et de les aboucher avec son prisonnier, moyennant promesse de ne lui parler que de ses affaires. Il leur était interdit tout particulièrement de dire un seul mot, « sous quelque prétexte que ce pût être, » de Mlle de Montpensier. On possède le récit de ces entrevues, tracé par Isarn. Il ne faut pas oublier en le lisant que Lauzun avait grand intérêt à inspirer une vive pitié à des gens qui allaient retourner le dire à Paris.

Après de longs préliminaires, Isarn en arrive à la première rencontre avec Lauzun, que personne n’avait revu depuis six ans : « (29 octobre 1677.) L’heure de deux heures étant venue, M. de Saint-Mars, ayant fait retirer tout le monde, nous pria d’entrer dans sa chambre, où l’on rangea six chaises autour d’une table, et M. de Saint-Mars étant sorti, revint un moment après, menant M. le comte de Lauzun, le soutenant sous le bras, car il ne pouvait guère bien se soutenir, soit à cause du grand air, de la grande clarté, ou de la faiblesse de sa maladie. À cette vue, j’avoue, monsieur, que nous fûmes touchés de pitié, car nous remarquâmes en lui une contenance si abattue, un visage si pâle, autant qu’il nous put paraître sous une barbe et une moustache fort longues, des yeux si remplis de tristesse et de langueur qu’il serait impossible de n’être pas ému de compassion ; je ne saurais vous exprimer la douleur de madame sa sœur et de monsieur son frère. »

« On lui présenta une chaise près du feu, devant le jour, mais il la retira, disant d’une voix basse et en toussant que le trop grand jour lui donnait dans les yeux et le feu dans la tête. M. de Saint-Mars le plaça contre le jour, il se mit à son côté et M. le commissaire de l’autre, moi à côté de M. de Saint-Mars, ayant mon écrit devant lui sur la table. Mme de Nogent ne