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Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 26.djvu/393

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séances à Vienne, il s’inquiétera de voir l’Église « chercher sa force dans les associations qui ne sont qu’une copie du gouvernement de la foule par elle-même, qui comprennent un public des plus mêlés, qui donnent des droits égaux aux laïques et aux prêtres, et qui peuvent fortifier les mauvais élémens inhérens à toute chose humaine. »

Le témoignage est précieux : c’est une sorte de jugement posthume porté par la Sainte Alliance sur les nouvelles méthodes d’action du catholicisme allemand. La surprise alarmée de Metternich souligne la nouveauté même de ces méthodes ; hier critique demain, et par là même s’accentue le contraste entre hier et demain. Mais hier, c’était pour l’Église l’impuissance, puisque, en dépit même du désir très sincère du chancelier, l’Église d’Autriche, ainsi que le disait Sepp au parlement de Francfort, s’éteignait en une véritable mort. Demain, au contraire, c’était l’efflorescence d’une presse catholique, la formation, dans le peuple catholique, d’une opinion exigeante et conquérante, le libre développement d’un certain nombre d’ordres religieux, et l’épiscopat, enfin, devenant assez conscient de ses devoirs pour être soucieux de ses droits.

L’année 1848, dans la vie de l’Église d’Allemagne, eut l’importance d’un tournant d’histoire. Un canoniste de valeur, M. Stutz, dans le résumé, chargé de faits, nourri d’idées, qu’il donnait il y a quelques mois des évolutions du droit canon[1], constatait que le XIXe siècle ménagea pour ces évolutions une nouvelle étape, dont le concile du Vatican fut le terme, et dont le trait essentiel est un renouveau d’autonomie de la puissance spirituelle. C’est en 1848 que cette étape s’ouvrit pour l’Église catholique d’Allemagne : après de longues années de tutelle, elle recommençait d’être traitée en majeure, à l’instant même où, pour la première fois, sous le regard des rois humiliés, loin du regard des rois fugitifs, était proclamée la majorité des peuples.


GEORGES GOYAU.

  1. Article Kirchenrecht dans l’Encyklopaedie der Rechtswissentchaft de Holtzendorff-Kohler.