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Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 26.djvu/514

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s’entendaient guère à les faire valoir, ils étaient criblés de dettes et tracassés par les créanciers. Ils regrettaient leur ancien métier, qui leur avait été si profitable, et au premier signe qu’on leur ferait, ils étaient prêts à reprendre les armes. On savait bien qu’il ne manquerait pas de gens pour se joindre à eux. Partout ils allaient trouver des mécontens, des révoltés, qui s’associeraient à leur fortune. C’étaient surtout les anciens propriétaires des biens qu’après chaque victoire le vainqueur s’était appropriés, qui, se trouvant sans ressources, s’étaient fait brigands. Depuis la guerre sociale et les guerres civiles, toutes les routes en étaient infestées. Il y avait aussi les gladiateurs qu’on exerçait pour les jeux publics, dans de grandes écoles, et qui étaient toujours disposés à s’échapper dès qu’on entr’ouvrait la porte. Milon et beaucoup d’autres s’en formèrent comme une garde, qu’ils amenaient avec eux sur la place publique les jours de vote et d’élection. Il y avait enfin les pâtres qui gardaient les grands troupeaux dans les gorges sauvages de l’Apennin. Ils étaient pour les conspirateurs une très précieuse ressource. On racontait que le consul Antoine, qui passait son temps à s’enrichir par ses pillages et à se ruiner par ses débauches, ayant été réduit à vendre ses domaines et ses troupeaux, avait gardé les pâtres, pour s’en servir quand il voudrait faire quelque mauvais coup. Voilà de quels élémens la petite armée de Catilina se composait. Le centre de ce mouvement militaire devait être Fæsulae (aujourd’hui Fiesole), au cœur de l’Étrurie. C’est là que Catilina réunit le gros de ses troupes, sous la conduite d’un ancien centurion de Sylla, Manlius ou Mallius, dans lequel il avait une pleine confiance. Tout ce qu’on nous dit de ce Manlius, c’est que c’était un brave soldat, et qu’il sut mourir avec courage.


VI

Nous venons de voir ce qu’on peut savoir — ou soupçonner — de ces troupes que Catilina avait réunies à Fæsulæ. Les conjurés de Rome étant plus en lumière et portant de grands noms, nous avons plus de renseignemens sur eux. Quand on connaît Catilina, on n’a pas de peine à imaginer comment tant de personnages importans s’attachèrent à lui. Pour ne pas remonter plus haut que ce qu’on appelle la première conjuration, nous avons vu que ce complot, qui n’était qu’un coup de main