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lettres d’hippolyte taine.

Renan, sa femme, ses enfans, sa belle-mère sont encore à Paris, bien inquiets, mais pas trop inquiétés.

Le général de l’École polytechnique m’a proposé de l’aire aux élèves quelques leçons, mais c’est une pure corvée que je n’accepte pas. M. Joseph Bertrand part après-demain et m’écrira de Versailles. M. Vavin, qui s’y trouve, m’a écrit deux fois ; on peut croire à peu près aux dépêches. Mais l’ordre ne sera pas rétabli avant la fin de mai.


A M. Max Müller.
Tours, 10 mai 1871.

Monsieur,

Je compte partir pour Oxford vers le 19 du présent mois ; mais, dans le trouble où sont les divers services des chemins de fer, je ne puis fixer avec une précision parfaite le jour de mon arrivée. Je vous serais très obligé si vous vouliez bien prévenir MM. les curateurs de l’Institut Taylor, et me dire si nul obstacle ne s’oppose à l’ouverture du cours.

Les troubles de Paris ont traversé mes projets, et m’ont empêché de vous écrire plus tôt. J’ai fait mes leçons à l’École des Beaux-Arts jusqu’au dernier moment, et, à la fin, j’ai rejoint ma famille à Tours. Là, après quelques difficultés, j’ai pu réunir les matériaux nécessaires pour les lectures que je dois donner à Oxford.

La préparation est maintenant presque complète, et je n’ai plus qu’à risquer l’expérience. Je souhaite qu’elle soit heureuse, et j’attache le plus grand prix aux renseignemens que vous avez bien voulu me donner à ce sujet. Pour ce qui est du logement et de la vie matérielle, vous m’avez offert votre entremise, et vous pouvez mieux que moi décider ce qui est convenable. Mes goûts, aussi bien que les circonstances présentes, me font préférer un train de vie simple, et tout à fait ordinaire. Quand j’étais à Londres, je louais deux chambres et mon hôtesse me faisait mon déjeuner. Mais, en ceci comme dans le reste, vous êtes mon guide, et je ne puis en souhaiter de meilleur.

D’après les dernières nouvelles, il me paraît probable que vers le 20 mai, nos troupes seront dans l’enceinte de Paris, et que les insurgés seront confinés derrière leurs barricades. Mon beau-père, qui est ici, prendra soin des miens, et les ramènera