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costume, cérémonial des professions et des prises d’habit, livres de prière, dévotions, scapulaire, triple règle ou vœu de chasteté, de pauvreté et d’obéissance, confession habituelle, mortifications et même usage de la discipline que Pusey recommandait[1], — au grand scandale de ces Anglais qui ne s’effarouchaient pas de voir conserver le fouet dans les écoles et dans l’armée, — observance de fêtes catholiques jusque-là ignorées dans l’Anglicanisme, comme le Corpus Christi et la Commémoration des morts, adoration de la Croix le Vendredi saint, parfois même, usage du latin dans le chant des hymnes et dans la célébration de la messe[2], tabernacle au-dessus de l’autel, les Espèces conservées dans un ciboire, bénédiction du Saint-Sacrement, etc. Que, dans ces couvens, le défaut d’expérience, l’absence d’une autorité dirigeante, d’un contrôle supérieur aient amené, de temps à autre, des abus, des excès, des désordres, ce n’est pas à nier ; mais, malgré tout, la vie religieuse y était intense, le zèle ardent et généreux[3]. Le crédit que les Sœurs acquéraient ainsi sur les populations, notamment sur les enfans par les écoles, elles l’employaient à propager les croyances et les pratiques du Ritualisme le plus avancé.

Tous ces faits, surtout ceux qui se passaient dans les églises ouvertes au public, ne pouvaient pas ne pas éveiller l’attention et par suite l’indignation des tenans du protestantisme. Lord Shaftesbury, personnage considérable du parti evangelical, conseiller écouté de plus d’un ministre dans les nominations d’évêques, philanthrope zélé, homme de foi, mais imbu de tous les préjugés puritains, avait entrepris, avec quelques amis, une enquête personnelle. Ayant ainsi assisté, le 23 juillet 1866, au service du dimanche, dans l’église S. Alban, il ne pouvait, en en sortant, contenir son indignation. « C’est le culte de Jupiter et de Junon, » écrivait-il. Le cérémonial, à son avis, dépassait tout ce qu’il avait vu dans les « temples romains » et lui faisait l’effet d’une « scène de gymnastique théâtrale, » d’une parade « histrionique, » d’une sorte de « mélodrame, au terme duquel on était surpris de ne pas voir tomber le rideau. » Et il s’écriait : « Conduisons-nous ainsi les âmes au Christ ou à

  1. Secret History, p. 39 à 41 et p. 185.
  2. Sur ce point, voir le témoignage formel d’un converti (Ibid., p. 193).
  3. Voyez par exemple la vie édifiante de l’une de ces religieuses, Harriet Monsell, a Memoir, par le Rev. Carter.