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Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 27.djvu/341

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plus compromis parmi les conspirateurs. Il était décidé à n’en poursuivre que neuf ; sur ce nombre, quatre seulement furent trouvés chez eux, un cinquième se sauva, au dernier moment, mais il fut repris dans la journée. On les tint sous bonne garde, en attendant que le Sénat décidât de leur sort. Le consul l’avait immédiatement convoqué, et il devait se réunir sans retard dans le temple de la Concorde, dont il reste quelques débris, au pied du Capitole. Cicéron se doutait bien que la séance allait être très importante ; il n’ignorait pas qu’elle pouvait avoir pour lui les conséquences les plus graves, et que ses ennemis iraient y chercher un jour des raisons de le perdre. Il voulut donc, dans son intérêt et dans celui de la république, qu’il restât un souvenir exact de ce qui allait s’y passer. Les procès-verbaux des séances du Sénat étaient rédigés d’ordinaire avec quelque négligence. Il prit ses précautions pour rendre celui-là plus fidèle que les autres, et voulut qu’il ne fût pas possible d’en contester la véracité. « Ce fut, a-t-il dit plus tard, une inspiration du ciel. » Il choisit, parmi les sénateurs qui avaient l’habitude et la facilité d’écrire vite, quelques hommes irréprochables, qui étaient en même temps des gens d’esprit, — car il faut avoir de l’esprit pour saisir la parole au vol, et recueillir dans ce qu’on entend ce qu’il importe de conserver, — et il les chargea de noter avec soin ce qui se dirait dans la séance. C’étaient entre autres un préteur en exercice, Q. Cosconius, des personnages de la plus haute noblesse, un Messalla, un Appius Claudius, et Nigidius Figulus, l’un des premiers savans de ce temps, qu’on mettait presque sur la même ligne que Varron. Cicéron avait bien raison de dire que personne n’oserait jamais les accuser de manquer d’intelligence ou de droiture pour transcrire latérite.

La séance du Sénat ne fut presque qu’un long interrogatoire. On introduisit d’abord Volturcius avec les députés des Allobroges. Il tremblait de peur, mais on lui promit qu’il ne serait pas poursuivi, et il dit tout ce qu’on voulait savoir. Comme on l’envoyait chez Catilina pour prendre les dernières dispositions, il était au courant de tous les projets, et les fit connaître. Les députés, auxquels on n’avait rien caché, furent intarissables de détails. Quand vint le tour des inculpés, il ne fut pas difficile d’obtenir un aveu de Gabinius et de Statilius. Cethegus opposa plus de résistance. On avait fait une perquisition chez lui et on y avait trouvé une grande quantité de poignards et d’épées ; il